Hippocrate, l’anti-Grey’s Anatomy qui passe au scalpel le milieu hospitalier

Hippocrate, l’anti-Grey’s Anatomy qui passe au scalpel le milieu hospitalier

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Par Florian Ques

Publié le

Près de quatre ans après son film éponyme, Thomas Lilti retrouve les couloirs de l’hôpital avec la version sérielle réussie d’Hippocrate.

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Année après année, rentrée après rentrée, il semblerait que la série hospitalière soit toujours là. De tête, presque par réflexe, on pense à Urgences, Dr. House ou encore Grey’s Anatomy : les ingrédients diffèrent mais la recette reste la même. Et si la fiction médicale semble increvable chez nos voisins d’outre-Atlantique – en témoigne le succès rencontré par The Good Doctor –, celle-ci reste encore peu exploitée en France. On peut désormais compter sur Thomas Lilti et son nouveau bébé, Hippocrate, pour lui accorder l’attention qu’elle mérite.

Composée de huit épisodes, Hippocrate – qui renvoie donc au fameux médecin de l’Antiquité et au serment que prêtent les médecins avant d’exercer – nous entraîne dans les couloirs aseptisés d’un hôpital français alors que la situation n’est pas au beau fixe. Pour des raisons de précaution, les médecins confirmés sont placés en isolement, laissant les internes en charge de tout le service. Épaulés par Arben, un FFI (faisant fonction d’interne) débauché pour leur prêter main-forte, Chloé, Alyson et Hugo vont devoir cumuler les heures supp’ pour mener à bien leur mission : aider leurs patients.

© Denis Manin/31 Juin Films/Canal+

Les cinéphiles le savent, Hippocrate est à l’origine un long-métrage sorti dans les salles obscures en 2014. C’est aussi et surtout le second film de Thomas Lilti, médecin généraliste de profession qui s’est au fil du temps reconverti dans le septième art. Et pour le coup, son expertise et son vécu sont bien exploités et servent à nourrir Hippocrate, lui conférant une dimension hyperréaliste que la majorité des séries médicales n’ont pas. Oui, Grey’s Anatomy, c’est toi qu’on regarde.

Ici, pas de coucheries dans la salle de repos à la moindre occasion, pas de cas médical tellement alambiqué qu’on n’y croit pas une seconde. Dès les premières minutes, Hippocrate joue la carte de la simplicité en représentant le quotidien d’internes en médecine tel qu’il est, et non pas comme la pop culture veut qu’on se l’imagine. La réalisation des huit épisodes est particulièrement sobre. Les couleurs, elles, sont plutôt sombres, plus que dans le long-métrage du même nom. Par moments, on se demande même si l’on n’est pas face à un documentaire tant la série de Thomas Lilti paraît sans artifices.

Dans cette optique de réalisme à toute épreuve, plusieurs détails font la différence. Par exemple, Chloé et Alyson, les protagonistes féminins de la série, incarnés avec beaucoup de justesse par Louise Bourgoin (L’amour dure trois ans) et Alice Belaïdi (WorkinGirls), ne portent pas – ou peu – de maquillage. Un brushing bien appliqué ? Non merci, pas le temps pour ça. Par ailleurs, les patients FTM (“female to male”, terme désignant les personnes trans passant de femme à homme) que traitent Chloé sont interprétés par de réelles personnes trans. Autrement dit, là où Urgences s’efforçait de coller au maximum à la réalité du milieu hospitalier, Hippocrate place la barre un cran au-dessus, jusque dans les coulisses.

© Denis Manin/31 Juin Films/Canal+

Le risque avec une œuvre trop réaliste, c’est que l’ennui peut vite nous guetter. Écueil évité ici, puisque les divers personnages écrits par Thomas Lilti sont d’emblée attachants. Sans être pour autant des stéréotypes ambulants, tous ont une personnalité et des traits de caractère bien définis. Louise Bourgoin, l’ex-Miss météo qui s’épanouit désormais sur le grand comme le petit écran, hérite d’ailleurs du protagoniste le plus captivant : Chloé Antovska, une interne control freak, en apparence sûre d’elle mais aux failles multiples et à la vie privée tumultueuse.

En bref, Hippocrate est un franc succès. En réadaptant les éléments de son long-métrage de 2014 à la sauce sérielle, Thomas Lilti prouve qu’il est tout aussi à l’aise en tant que showrunner. Cette première saison (de plusieurs, on espère) dépoussière le genre de la série médicale, lui ôtant le côté soap dont on l’affuble trop souvent pour lui préférer une approche plus naturaliste. Et au-delà d’illustrer le quotidien des blouses blanches, la série n’a pas de mal à mettre en lumière les travers du système hospitalier français et, plus largement, de notre société. Il n’est pas trop tard pour se faire prescrire une dose d’Hippocrate.

La première saison d’Hippocrate est diffusée dès le 26 novembre sur Canal+.