Si vous aimez Les Simpson, vous aimerez l’attachante et déjantée Bob’s Burgers

Si vous aimez Les Simpson, vous aimerez l’attachante et déjantée Bob’s Burgers

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Par Delphine Rivet

Publié le

Comme Les Simpson, c’est une famille qui ne vieillira jamais. Et comme chez eux, sous les gags et les vannes bien senties se cache un cœur gros comme ça.

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Deux parents, trois enfants, deux familles de la classe moyenne qui n’aspirent qu’à être heureux sous le même toit, tout en restant, bien entendu, à l’abri du besoin et des coups durs. C’est sur ces fondations que se sont bâties les séries animées Les Simpsons (débutée en 1989 et créée par Matt Groening) et Bob’s Burgers (lancée en 2011 et imaginée par Loren Bouchard), toutes deux diffusées sur la chaîne FOX.

The American way of life

Voilà deux séries qui donnent à voir les Américains moyens. Elles sont les produits de leur époque, ou plutôt, de leurs époques, au pluriel. Les Simpsons, à l’image de la famille américaine type, n’a que très peu évolué depuis ses débuts en 1989. Une mère au foyer et un mari qui travaille (si on peut appeler ça travailler) à un poste qui l’ennuie, et un patron riche et tyrannique. Bob Belcher, le papa de Bob’s Burgers, de son côté, est le fruit d’une lente mutation du modèle familial. Son restaurant est une entreprise collective où même les enfants aident pour les corvées dès qu’ils rentrent de l’école. Il n’est pas le “chef de famille”, c’est d’ailleurs à peine s’il est une figure d’autorité pour ses enfants, mais tout le monde y met du sien pour faire tourner la boutique. C’est une véritable entreprise collective où chacun, même les plus jeunes, est impliqué dans le bon fonctionnement du foyer.

Chez Les Simpson, l’histoire se déroule dans une ville, Springfield, ni métropole urbaine, ni bourgade rurale, qui pourrait être située dans n’importe quel état. Le nom, d’ailleurs, est très commun aux États-Unis et l’on trouve des Springfield sur tout le territoire, et même en Nouvelle-Zélande ! C’est un autre point commun qu’elle partage avec Bob’s Burgers. Le restaurant des Belcher semble se situer partout et nulle part à la fois. La ville n’est jamais nommée, et l’on reconnaît une architecture victorienne comme on peut en croiser à foison à San Francisco – le créateur, Loren Bouchard, vivait là-bas quand il a imaginé la série. Non loin de là, les quais rappellent ceux de Coney Island, ce qui expliquerait le fort accent brooklynien de Linda. De l’aveu même du showrunner, “c’est une semi-Springfield”.

Des familles (pas) comme les autres

Côté marmots, on retrouve aussi des points de convergence, comme entre Louise et Bart, tout deux rebelles de l’autorité. Ils se situent cependant à différents degrés de malice. Bart a celle d’un garçon de son âge, casse-cou, effronté… Louise, c’est une toute autre histoire. Elle cumule la défiance de ce dernier envers l’autorité (les parents, les profs, etc.) avec l’intelligence de Lisa. Elle n’a d’ailleurs aucun mal à dominer les conversations avec les adultes, les manipulant à l’envi. Mais elle est bien plus proche de sa famille que ne peut l’être Bart avec les siens. D’une manière générale, d’ailleurs, les Belcher sont bien plus unis dans l’adversité et font front commun en cas de galère.

Et les enfants de cette petite tribu sont le grain de folie qui maintient l’ensemble à flots. Louise, en particulier, est un génie du mal dans le corps d’une gamine… et c’est pour ça qu’on l’aime. Ça, et l’allure farfelue que lui donne son bonnet aux oreilles de lapin roses dont elle ne se sépare jamais. Il est d’ailleurs amusant de noter que tous les Belcher ont chacun, à l’instar des Simpson, leur part d’excentricité. Gene est un doux idiot qui a toujours les idées les plus folles ; Linda, la mère, est l’éternelle optimiste dont chaque “Alright!” provoque un sourire instantané ; et Tina, l’adolescente en plein cataclysme hormonal, n’a qu’une obsession : les fesses de Jimmy Jr. La seule exception de cette joyeuse tribu, c’est Bob. Le paternel est le plus normal, le plus responsable, le plus anxieux aussi. Il est aussi notre point d’entrée dans la série. C’est par lui qu’on intègre la famille et que l’on apprend, comme lui, à embrasser cette douce folie qui anime les Belcher.

Que ce soit chez Les Simpson ou dans Bob’s Burgers, le temps qui passe n’a aucune prise sur les personnages. Nous ne verrons jamais Homer vieillir, pas plus que l’on n’assistera à la remise de diplôme de Louise. Rien de grave ne peut arriver. En dépit des petits accrocs de la vie, et de l’inquiétude quasi constante que l’argent finisse par manquer, les Simpson et les Belcher sont avant tout une grande source de réconfort, et bien sûr de rire, pour leur spectateurs. C’est d’ailleurs peut-être sur ce dernier point que Bob’s Burgers distance sensiblement son aînée.

L’élève a dépassé le maître

Même si tout est affaire de point de vue et de goûts, a fortiori quand on parle d’humour, on peut reconnaître à Bob’s Burgers des ressorts narratifs et comiques plus élaborés. Attention, il n’est pas question de descendre Les Simpson de son piédestal, mais le phénomène d’usure est aussi inévitable. On peut difficilement reprocher aux scénaristes de se répéter après 28 ans à imaginer de nouvelles histoires chaque semaine, mais c’est ce qui lui vaut d’être surpassée par sa jeune héritière âgée de seulement sept saisons. Bob’s Burgers a pour elle la vivacité des “débuts” et une constance remarquable.

Après un quart de siècle à rire avec Les Simpson, la série est surtout devenue une présence rassurante, que l’on connaît par cœur et qui nous conforte dans nos petites habitudes hebdomadaires. En gros, c’est la paire de vieilles pantoufles que l’on refuse de jeter, celle dans laquelle on se sent bien même si elle n’a plus grand chose à offrir d’autre qu’une bonne dose de réconfort. Ce qui est déjà pas mal. Là où Bob’s Burgers la devance, c’est dans la sensibilité dont elle fait preuve à travers son écriture. Une sensibilité que Les Simpsons font souvent passer au second plan, au profit du gag, dont la récompense est immédiate.

Plus subtils, ses personnages, en dépit de leur folie, sont aussi plus ancrés dans la réalité. À commencer par le fait qu’ils sont “anatomiquement corrects”. Touchante, souvent hilarante, depuis sept saisons, Bob’s Burgers fait mouche à chaque épisode. Mais c’est peut-être aussi parce qu’elle a plusieurs niveaux de lecture et est un peu moins premier degré qu’elle n’a pas conquis le reste du monde, comme Les Simpsons, davantage dans la caricature et la fantaisie.

Il y a un double avantage à créer une série d’animation sur une famille qui ne change jamais : c’est rassurant et, tant que les comédiens seront partants pour faire les voix et que les audiences seront au rendez-vous, elle est potentiellement immortelle. Cela fait 28 ans que Les Simpson nous fait rire, et on souhaite au moins autant d’années d’antenne à Bob’s Burgers.