New Girl : Jess ou l’éternelle insatisfaction de la génération Y

New Girl : Jess ou l’éternelle insatisfaction de la génération Y

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Par Florian Ques

Publié le

Avec son inimitable optimisme, la comédie sait utiliser ses personnages pour représenter les aléas de sa génération. La preuve dans l’épisode 9 de la saison 6. Attention, spoilers.

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Pour sa sixième année à l’antenne, New Girl donne le ton : l’heure est au changement. Fraîchement mariés, Schmidt et Cece font retaper une baraque insalubre pour emménager ensemble. De son côté, Winston est complètement entiché d’Ally, sa collègue fliquette, tandis que Nick découvre les travers de la relation longue distance avec la sulfureuse Reagan. Quant à Jess, elle s’épanouit dans sa vie professionnelle bien qu’elle trime côté sentimental. Tout ne peut pas être parfait. Grosso modo, les colocs grandissent enfin, à un rythme aussi décalé que leurs personnalités.

Ces derniers temps, la sitcom nous vend gentiment l’histoire naissante entre la survoltée Jess et le plus reposant Robby. Lors du repas déjanté de Thanksgiving, Jess avait failli larguer le pauvre garçon car elle ne ressentait pas encore le “oomph”. Mais si, le “oomph”, cette petite étincelle qui nous donne cette envie presque viscérale d’avoir un second rendez-vous, puis un autre et encore un autre. Le feeling, en somme. Jusqu’ici rongée par le doute, Jess avait fini par avoir les fameux papillons dans le ventre. Résultat des courses : les deux cumulent les dates sans pour autant donner de label à leur relation. Leur compromis ? La relation ouverte.

Incapables de s’avouer qu’ils ont envie d’être exclusifs (la monogamie, c’est so 2010), Jess et Robby décident de rencontrer d’autres personnes et, pire, de se les présenter durant un double rendez-vous des plus gênants. Sans surprise, cela se termine en une dispute qui mène à une Jess complètement bourrée jusqu’à une rave party grecque, parce que pourquoi pas, après tout. Là-bas, elle rumine et regrette son immaturité : “I’ve been hesitant from the beginning. Like I need to be convinced (J’ai été hésitante depuis le début. Comme si j’avais besoin d’être convaincue).”

Avec la légèreté dont elle a fait sa marque de fabrique, New Girl met le doigt sur un des grands troubles de cette décennie. Jess n’est à aucun moment sûre de vouloir être avec Robby, principalement parce qu’elle est convaincue de pouvoir trouver mieux, ou du moins quelqu’un de différent. Elle s’investit peu, ne cherchant pas volontairement à apprendre des choses à son sujet.

En 2001, John de Graaf, David Wann et Thomas H. Naylor introduisent dans leur ouvrage commun le concept d’affluenza (néologisme entre affluence et influenza, aka la grippe en anglais). Dans une vision critique du consumérisme, ils décrivent le phénomène comme une condition presque maladive qui pousse les individus à poursuivre une quête obstinée du “toujours plus”. Si le terme s’applique initialement à un contexte économique, New Girl semble souligner l’existence d’une affluenza relationnelle. Ce besoin injustifié de vouloir toujours davantage conduit à une insatisfaction chronique, symbolique de la génération Y.

Avec la multiplication des réseaux sociaux et des applis à la Tinder et autres Happn, un monde incroyablement vaste s’offre à nous, plein de potentielles connexions humaines à explorer. On ne veut plus prendre le temps et redoubler d’efforts pour connaître une personne. À la moindre épreuve, on baisse les bras, et c’est ce qu’a failli faire Jess dans ces derniers épisodes. Fidèle à sa tonalité résolument optimiste, New Girl confronte son héroïne à son incertitude omniprésente et aboutit à une conclusion rassurante : Jess s’excuse auprès de Robby et lui fait part de son envie d’apprendre à le connaître plus amplement.

Pendant ce temps, Schmidt tente d’amadouer le gars en charge de la rénovation de sa nouvelle maison car les travaux ne vont pas assez vite à son goût. Il est aidé par Nick, qui a visiblement beaucoup de temps à perdre lorsque sa douce Megan Fox n’est pas dans les parages (tant mieux pour nous). En parallèle, les scénaristes ont opté cette semaine pour coller Winston et Cece ensemble. Étrangement, le combo des deux prend bien, probablement car Winston s’est imposé progressivement comme le personnage le plus drôle du show. Nous, on vote pour un épisode entièrement dédié à Winston et à son chat Ferguson.

En bref

Les + : entendre les mots “dirty slut” de la bouche de Schmidt, le duo Winston-Cece, Jess et son prétendant espagnol qui poussent la chansonnette
Les – : le date de Robby qui s’appelle Babz (quoi qu’on en dise, ce n’est pas un prénom), le vin artisanal dans une bouteille plastique (sacrilège), l’absence de Ferguson
Citation de l’épisode ou quand Jess voit sur le long terme :

Cece : And are you sure you’re just not scared to get serious with Robby because you don’t want to get hurt?
Jess : No, I’m not scared, I just… don’t want to start a relationship with someone I barely know. I mean, he has a boat. What’s next, a kid? And then I have to meet the boat and the kid at some weird sea luncheon?

Cece : Et tu es sûre que tu n’as pas peur de passer aux choses sérieuses avec Robby juste parce que tu ne veux pas être blessée ?

Jess : Non, j’ai pas peur, c’est juste… Je ne veux pas entamer une relation avec quelqu’un que je connais à peine. Je veux dire, il a un bateau. C’est quoi ensuite, un gosse ? Et après je dois rencontrer le bateau ET le gosse autour d’un déjeuner marin chelou ?