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Skam France : quand un succès planétaire devient un remake efficace

Skam France : quand un succès planétaire devient un remake efficace

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© France Télévisions / GTV Productions

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Par Florian Ques

Publié le

Le temps de quatre saisons poignantes, les ados norvégiens de Skam ont fasciné un public aussi conséquent qu’international. En 2018, place à son adaptation francophone.

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Ce lundi 5 février, 10 h 37. Après un discours anticapitaliste pour le moins exalté de la bouche de son boyfriend, Emma Borgès scrute d’un air blasé une bande de filles se pavanant près d’elle, en slow motion bien entendu. Cette scène d’exposition de Skam France est sûre de laisser un arrière-goût de déjà-vu aux aficionados de la version originale. Car oui, sans trop de surprise, ce remake du hit scandinave prend surtout des airs de fac-similé en panne d’inspiration. Il n’empêche qu’au final, le rendu fonctionne, et en deviendrait même carrément addictif.

En 2017, quand un projet d’adaptation francophone de Skam a été annoncé, toute la fanbase de la série norvégienne est entrée en ébullition. Oser toucher à Noora, Sana et toute la bande ? Ça sentait le blasphème à plein nez pour les téléspectateurs les plus hardcore. Pourtant, n’ayant pas froid aux yeux, France Télévisions s’est embarquée dans cette version hexagonale avec ferveur. Quant à eux, les jeunes comédiens de Skam France furent les premiers à avoir conscience qu’ils seraient attendus au tournant. “C’est la première chose qu’on s’est dit, concède Marilyn Lima, aka Noora 2.0, on va se faire défoncer.”

Et pour cause, succéder à une série ayant autant cartonné à l’échelle internationale, c’est un sacré défi. Après visionnage des cinq premiers épisodes (la saison 1 en compte neuf au total), il faut reconnaître que ce remake n’instille que très peu d’originalité. Les scènes paraissent calquées au minutage près sur le Skam pionnier, tandis que les répliques sont souvent identiques en tout point et sonnent surtout comme une traduction bien menée, presque littérale. Mais alors, comment expliquer que Skam France soit une réussite ?

Tout d’abord, la transposition en France. Le Skam nordique possédant ses propres spécificités que notre Hexagone ne partage pas, il était nécessaire pour cette adaptation de, justement, s’adapter à son pays. À l’écran, cela se manifeste par une plus grande diversité ethnique et culturelle. “C’est la même histoire, mais avec des personnages sensiblement différents, reconnaît David Hourrègue, réalisateur de cette nouvelle série digitale. On voulait que ça ressemble à la société française.” Le casting reflète alors notre société contemporaine, de même que ses pratiques en vigueur, tel le port du voile interdit dans les établissements scolaires.

Au-delà de ça, ce remake réussit avec brio sa transition en terres françaises par sa mobilisation de multiples références qui nous sont propres. Les gars de la bande écoutent Bigflo & Oli, les filles évoquent un article de Topito qu’elles ont vu passer sur leur fil d’actu Facebook. Des repères culturels contemporains efficaces qui devraient parler aux ados français, lesquels sont, rappelons-le, la cible visée.

L’autre point sur lequel on peut féliciter les têtes pensantes derrière cette adaptation, ce sont les dialogues. Skam France évite le piège des répliques trop littéraires. Un écueil qui vient souvent ternir les productions bleu-blanc-rouge, dopées aux discussions irréalistes à la limite de l’absurde. “On est très libres au niveau des textes dans notre manière de nous exprimer”, valide Léo Daudin, qui incarne Yann (ou Jonas pour les intimes). Et c’est pour ça que ça marche. Enfin, sur les écrans français, peut-on voir des personnages qui parlent non pas comme des personnages, mais comme des personnes.

Cette familiarité est indubitablement l’un des points forts de cette adaptation, participant à rendre attachant l’ensemble des protagonistes. On peut ajouter à cela des prestations franchement louables, avec une mention spéciale pour Assa Sylla (déjà bluffante dans Bande de filles), alias la nouvelle Sana avec autant de mordant, et Philippine Stindel (remarquée dans Going to Brazil), qui fait de la Eva norvégienne un peu fade, une héroïne fraîche et sympathique.

Alors bon, on ne va pas se mentir, Skam France est avant tout destinée aux néophytes et met toutes les chances de son côté avec une réalisation hyperléchée et un sentiment de réalisme assez saisissant. Quant aux fans de la version scandinave, deux alternatives s’offrent à eux. Éviter ce remake (mais ça, c’est si vous partez dans l’idée de ne pas aimer). Ou bien s’affranchir des a priori et lui donner une chance, de peur de passer à côté d’une des meilleures séries pour ados produites dans notre Hexagone. Et oui, rien que ça.

Les épisodes de Skam France seront disponibles chaque vendredi soir sur la plateforme france.tv Slash.