Snatch : un braquage classe et foutraque qui a foiré à mi-parcours

Snatch : un braquage classe et foutraque qui a foiré à mi-parcours

photo de profil

Par Adrien Delage

Publié le

Les gangsters à la cool de Snatch ont réussi le pari de nous divertir malgré une première saison au rythme en dents de scie. Attention, spoilers.

À voir aussi sur Konbini

Au milieu des géants Netflix et Amazon, une petite plateforme tente de faire son trou. Crackle, qui n’est pas présente en France pour le moment, est rattachée à Sony et possède une palette de contenus originaux encore restreinte. Cette année, elle a proposé un projet sériel alléchant avec Snatch, dont le script est basé sur le film éponyme de Guy Ritchie sorti en 2000. Une énième adaptation d’un film en série qui a réussi son pari à en croire Crackle, l’ayant renouvelée pour une saison 2.

Si le show reprend les archétypes des personnages principaux du long-métrage, le showrunner Alex De Rakoff (Dead Man Running) a décidé de donner un coup de balai en rajeunissant son sujet. Le casting est ainsi composé de jeunes acteurs bien connus des sériephiles comme Luke Pasqualino (Skins), Ed Westwick (Gossip Girl) ou encore Stephanie Leonidas (Defiance) et de nouvelles têtes comme Phoebe Dynevor. En prime, Rupert “Weasley” Grint tient l’un des rôles principaux. Sur le papier, Snatch promettait donc une jolie distribution qui offrait aux millenials une série de gangsters drôle et déjantée.

Sur les cinq premiers épisodes, qui suivent assez fidèlement la trame du long-métrage, le show est un divertissement solide à la réalisation presque aussi dynamique et inventive que celle de Guy Ritchie. Malheureusement, le concept s’essouffle par la suite et on finit même par se lasser de ces personnages au final assez lisses et de ces intrigues inégales.

Qui a commandé un teen drama ?!

Albert, Charlie et Billy sont une bande de potes qui tentent tant bien que mal de se faire un nom dans le milieu criminel londonien. Au cours de leur périple, ils vont affronter certains individus et s’associer avec d’autres : un gangster parano et drogué, des juifs américains, un flic désabusé, un camp de roms… Comme le long-métrage, la palette de personnages de Snatch est variée et réserve constamment de bonnes surprises. Ils sont tous hauts en couleur et essaient d’obtenir leur part du gâteau, avec une détermination foutraque qui engendre des situations cocasses comme la fameuse baignoire en or que Chloe essaie de refourguer au premier ricain riche et bling-bling venu.

Tous les comédiens jouent leur partition même si chaque spectateur trouvera son petit chouchou : Charlie est un gros nounours complètement dans la lune, Albert est sûr de lui mais ne parvient pas à grandir dans l’ombre de son père, Billy est un boxeur raté au grand cœur… Difficile de ne pas se prendre d’affection pour ces personnages attachants, cependant vite trahis par le scénario de la série.

Au fur et à mesure que les épisodes défilent, Snatch perd en impact et en affect. L’intrigue autour de l’or de Vic Hill tourne rapidement en rond si bien que les scénaristes ont choisi de creuser leurs personnages principaux. Mais c’était une fausse bonne idée, car en procédant ainsi, les défauts du show n’en deviennent que plus flagrants. Après l’épisode 5, Snatch tombe dans un teen drama lamentable, bourré de clichés et de romances à l’eau de rose imbuvables. Les acteurs révèlent un visage lisse et trop beau pour être vrai qui rappelle les mauvaises heures de Gossip Girl ou le récent Riverdale. Et qui n’est vraiment pas raccord avec les personnages bourrus et torturés du film de Guy Ritchie.

C’est encore pire lorsque les scénaristes se focalisent sur les parents. Le duo composé de Vic Hill et Hat’em est franchement lourd et les épisodes 6, 7 et 8 donnent la mauvaise impression de servir de remplissage. Heureusement, il y a le terrible Bob Fink (Marc Warren, parfait en flic ripou) pour redynamiser la course à l’or de Vic Hill.

Même la mise en scène, vive et délicieusement asymétrique au début de la série, devient fade et étrangement banale dans ces épisodes. Certaines scènes nous renvoient même à la préhistoire, notamment quand Chloe, Lotti et Lily s’occupent de faire le ménage tandis que les hommes nettoient leurs armes avant de partir à la guerre…

Au final, les gangsters à la cool de Snatch fument, se bourrent la gueule, baisent et à l’occasion appuient sur la détente pour effrayer leurs adversaires. Mais contrairement au film, jamais ils ne se demandent si leurs actions sont bonnes ou mauvaises, à aucun moment ils ne prennent un peu de recul pour se remettre en question. En jouant la carte du teen drama, Snatch est tombée dans son propre piège, là où elle aurait pu être à la fois fun ET intelligente.

Vide de sens et assez superficielle, la série d’Alex De Rakoff reste toutefois prometteuse. Elle vient de passer la première (et pire) étape de sa vie sur le petit écran, à savoir une saison initiale entièrement empreinte du matériau de base. Elle peut maintenant sortir le gros calibre et nous redonner envie de suivre les aventures désastreuses de ces frappes londoniennes.

En France, la saison 1 de Snatch reste inédite.