Blood of Zeus, une réécriture cynique et sanglante de la mythologie grecque

Blood of Zeus, une réécriture cynique et sanglante de la mythologie grecque

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Ⓒ Netflix

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Par Adrien Delage

Publié le

Au programme : un nouvel Hercule, des démons abominables et du drama entre Zeus et Héra.

Quintessence du récit initiatique et du voyage du héros, la mythologie continue de fasciner à notre époque. Netflix, le roi des tendances en termes de série, n’a jamais manqué d’en profiter pour séduire toujours plus d’abonnés. La plateforme s’est d’abord concentrée sur le panthéon scandinave, avec Ragnarök et le spin-off de Vikings en développement, et se tourne désormais vers la plus célèbre et appréciée dans le monde, la mythologie grecque. En attendant la série live action Kaos, Netflix nous propose ce mois-ci un anime dans l’Olympe des dieux de la Grèce antique avec Blood of Zeus.

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La série animée revisite une histoire classique des mythes anciens avec un twist fantastique : Zeus et les dieux parviennent à vaincre les terribles Titans, mais leur leader lance une malédiction avant de mourir et une armée de démons déferle sur la Terre. Les humains paient donc le prix fort du semi-échec des tout-puissants, jusqu’au jour où Héron, demi-dieu et fils de Zeus, prend les armes pour sauver la Terre et l’Olympe. Mais il ne se doute pas que, dans l’ombre, une déesse blessée et remontée souhaite sa mort et la faillite de sa quête salvatrice.

Battle royal sur le mont Olympe

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Création originale signée par les frères Charley et Vlas Parlapanides (Les Immortels), Blood of Zeus est une nouvelle production de Powerhouse Animation, un studio américain qui a fait ses premières armes sur des publicités Coca-Cola, des jeux vidéo (Mortal Kombat X) et surtout l’excellente adaptation de Castlevania. Leur style d’animation s’inspire en grande partie d’œuvres japonaises, dont des mangakas tels que Kentaro Miura (Berserk) et Hiroaki Samura (L’Habitant de l’infini). Même si les références sont appréciables, l’animation de Blood of Zeus peut ne pas plaire au plus grand nombre.

En effet, elle est composée pour la plupart du temps de décors fixes mais très chargés, comme des tableaux surréalistes. C’est franchement beau, notamment avec un travail sur la lumière impressionnant qui rappelle le ray tracing des consoles next gen, mais ce style peut aussi déstabiliser par rapport à des dessins plus traditionnels. Au cœur de l’action, qui ne manque pas de rythmer le voyage de Héron et des dieux, les séquences sont parfois saccadées et manquent de fluidité, malgré leur aspect spectaculaire et (très) sanglant.

Que l’animation de Blood of Zeus vous plaise ou non, l’anime a d’autres qualités à défendre. On pense d’abord à sa palette de personnages variés et charismatiques. La narration a même tendance, dans la première partie de saison, à délaisser Héron pour les personnages secondaires, voire les méchants de l’histoire. Leur psyché et leur origin story sont davantage creusées que celle du protagoniste, ce qui n’est pas plus mal finalement tant Héron paraît superficiel, chiatique voire antipathique. On se prend d’affection pour ces antihéros tragiques, en particulier Seraphim, dont le destin tragique évoque des figures mélancoliques de la pop culture, d’Œdipe à Anakin Skywalker en passant par Hamlet.

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Cette justesse d’écriture offre également aux personnages féminins un bien meilleur traitement que dans les œuvres de fiction antérieures. Souvent reléguée à une image de déesse douce et fidèle, Héra incarne ici la figure forte, rusée voire sournoise de l’Olympe. Las des sempiternels adultères de Zeus avec des humaines, elle décide de prendre sa revanche quitte à mettre le Panthéon et les humains en péril. Dans l’ombre, elle tire les ficelles de sa propre révolution féministe contre l’impureté et l’indécence masculine, chez les dieux comme chez les hommes. Un personnage qui inspire le respect et la fascination, que même Cersei Lannister n’oserait défier.

Évidemment, tout ce remue-ménage du couple divin amène à une guerre épique, qui dépasse complètement les humains. Blood of Zeus offre un battle royal gore et haletant à ses spectateurs, où Héron et ses alliés massacrent du démon à foison. Les épisodes se dévorent à un rythme effréné, aussi bien accompagné par des séquences de combats à l’épée jouissives que de rage électrique lorsque Zeus déploie sa foudre sur ses ennemis. L’anime arrive parfois à la limite du nanar, dans ce gloubi-boulga belliqueux entre fantasy et mythologie, mais parvient toujours à reprendre le droit chemin grâce à sa narration émouvante.

On ne s’ennuie pas une seconde et la série animée propose aussi une forme de poésie macabre dans sa violence, puisque les héros de l’histoire sont tous tributaires des trahisons ou des actes répréhensibles de leur père, héritiers d’un fardeau qui a sali leur innocence. Blood of Zeus est une réécriture fraîche et épique de la mythologie classique, quelque part à la croisée de The Witcher et Les Chevaliers du Zodiaque. En somme, c’est bien une véritable tragédie grecque mais modernisée qui prend forme devant nos yeux ébahis.

La première saison de Blood of Zeus est disponible en intégralité sur Netflix.