La série Hanna est un périple introspectif captivant sur fond d’espionnage

La série Hanna est un périple introspectif captivant sur fond d’espionnage

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© Amazon Prime Video

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Par Florian Ques

Publié le

Sans être une pâle copie du film dont elle s'inspire, la série d'Amazon s'impose comme un récit d'apprentissage soigné.

C’est en 2011 que Hanna, long-métrage réalisé par Joe Wright (Orgueil et préjugés), a débarqué dans les salles obscures. Une proposition intéressante puisque ce film d’action germano-britannique a cassé les codes du genre, en offrant une narration au rythme mesuré et une réalisation bien plus intimiste que ce à quoi on pouvait être habitué. Cette œuvre atypique aura convaincu la critique, mais sans pour autant marquer l’histoire du cinéma.

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Près de huit ans plus tard, Hanna Heller revient à la vie. David Farr, coscénariste du film originel, revisite l’univers de Hanna au format épisodique, à travers une série tout juste mise en ligne sur la plateforme de streaming d’Amazon. “Le truc, c’est que le film était un régal visuel assez fantastique, avance-t-il. Mais il y avait des aspects de l’histoire de Hanna que le film n’arrivait pas à raconter pour tout un tas de raisons différentes.”

Pour les néophytes – sans trop en dévoiler –, Hanna, la série comme le film, relate le parcours de cette jeune adolescente à la vie peu conventionnelle. Après avoir grandi dans une vaste forêt, avec un père peu loquace pour seule compagnie, elle finit par s’attirer des ennuis. Ennuis qui l’amènent à fuir et à être traquée aux quatre coins de l’Europe par un groupe de la CIA. La vérité, c’est que Hanna n’est pas une gamine ordinaire et elle va l’apprendre bien assez tôt, si tant est qu’elle survive à ses assaillants.

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Sur le papier, Hanna a tout d’un film d’action comme Hollywood a pu nous en pondre des dizaines et des dizaines au fil des ans. À une différence près : Hanna, la série surtout, va bien au-delà, en entremêlant le côté haletant du thriller, même bourrin, avec le genre du “coming of age” (comprendre récit d’apprentissage, de passage à l’âge adulte, dans lequel un personnage apprend à se découvrir).

“J’ai toujours adoré les œuvres d’espionnage, que ce soit dans la littérature, au ciné ou à la télé, évoque David Farr, showrunner de cette adaptation sérielle, parce que je pense qu’elles permettent de parler d’identité de façon originale. C’est clairement le cas ici, avec l’histoire de cette jeune femme qui essaie de se trouver, elle, tout en essayant de trouver sa place dans le monde”. Car si le côté thriller reste constamment présent, c’est bien le côté plus introspectif de Hanna qui prédomine tout du long.

Lorsqu’elle s’émancipe du joug paternel, Hanna se confronte au monde extérieur et, plus largement, à la société. Ayant grandi jusqu’ici pratiquement en autarcie, elle découvre tout un champ des possibles et tâtonne, essaie de comprendre. La jeune comédienne Esme Creed-Miles succède à Saoirse Ronan, qui incarnait Hanna dans le film de 2011, et s’approprie le rôle avec une aisance déconcertante, insufflant ce qu’il fallait de subtilité dans son jeu pour rendre son personnage crédible.

Au-delà de la dimension humaine de ce remake, Hanna est aussi une bonne série d’action, tirée vers le haut par les deux protagonistes qui tentent de mettre la main sur l’héroïne éponyme : d’un côté, son père, incarné par Joel Kinnaman, désespéré de la retrouver pour la protéger coûte que coûte. De l’autre, Marissa Wiegler, une agente têtue de la CIA qui piste Hanna depuis de longues années, ici jouée par Mireille Enos.

Si les noms de ces acteurs vous semblent familiers, c’est parce qu’ils ont partagé l’affiche de The Killing pendant une flopée de saisons. De collègues soudés à ennemis jurés, il n’y a visiblement qu’un pas pour ces deux-là, qui ont pu à cette occasion explorer une autre dynamique de jeu.

“C’était super de se retrouver, nous explique Mireille Enos. Je pense que les meilleurs rivaux sont joués par des gens qui s’aiment. Tu te lâches plus facilement, tu n’as pas peur de heurter les sentiments de l’autre. Tu sais que t’es entre de bonnes mains.” C’est à ce duo à l’alchimie approuvée qu’on doit d’ailleurs les meilleures scènes d’action de ces huit épisodes, impeccablement chorégraphiés.

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“J’adore cet aspect-là du travail et pouvoir bosser avec des cascadeurs, confirme Joel Kinnaman, adepte du ju-jitsu autoproclamé, qui avait déjà fait ses armes dans Altered Carbon du côté de Netflix. Et j’étais excité à l’idée de voir Mireille montrer ce côté de sa personnalité. C’est une vraie ceinture noire de taekwondo.” Sur ce point-là, on veut bien le croire.

Ce n’est pas la seule partie où l’acteur a excellé, puisqu’il a également dû apprendre à maîtriser la langue allemande pour son rôle. “À l’origine, tout était écrit en anglais et je m’y étais fortement opposé car je pensais vraiment que chaque personnage devait parler sa langue naturelle, détaille-t-il durant notre interview. Mon personnage est un Allemand à la base. Mais je n’en parlais pas un seul mot et j’ai eu d’un coup une vingtaine de scènes à faire en allemand, donc c’était un vrai travail de prononciation”. Un travail qui a payé, puisque la série réussit à être immersive, aussi grâce aux multiples langues parlées qu’aux plans saisissants du continent européen.

Somme toute, bien qu’il n’ait pas été nécessaire a priori, ce remake justifie assez vite son existence, ne serait-ce que par la profondeur accordée à son héroïne tourmentée. “Je dirais qu’on ne parvient jamais à connaître vraiment la Hanna du film, qui est une vraie force de la nature, avance David Farr. Il y a beaucoup plus de vulnérabilité avec la version série.” C’est d’ailleurs là que réside l’attrait de la Hanna estampillée Amazon, adolescente suffisamment captivante pour qu’on espère la recroiser dans une saison 2, fortement désirée par son créateur.

La première saison de Hanna est disponible dès maintenant en intégralité sur Amazon Prime Video.