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The Midnight Gospel, le trip cosmique délirant du créateur d’Adventure Time

The Midnight Gospel, le trip cosmique délirant du créateur d’Adventure Time

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© Netflix

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Par Florian Ques

Publié le

Au carrefour entre le podcast et l'œuvre d'art psychédélique, cette nouvelle série animée est un plaisir exigeant et innovant.

Ça y est, plus besoin de chercher. 2020 n’est même pas achevée qu’on vient déjà de mettre la main sur la proposition sérielle la plus novatrice de l’année. Elle répond au doux nom de The Midnight Gospel et à travers seulement huit épisodes, fait travailler nos méninges à plein régime en abordant une pléthore de thématiques, allant des drogues à la méditation.

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Dans cette série d’animation a priori saugrenue, on suit les errances de Clancy, un “spacecaster” (contraction de “space” et “podcaster”). Grâce à un simulateur de seconde main, il se rend dans des dimensions et mondes parallèles, tous plus perchés les uns que les autres. Sur place, cet aventurier entêté trouve une personne lambda à interviewer pour son émission. S’ensuivent alors des échanges complexes, parfois alambiqués, mais terriblement enrichissants au bout du compte.

Avant toute chose, il faut savoir que The Midnight Gospel est le fruit d’une collaboration entre Pendleton Ward, créateur de la très connue Adventure Time et Duncan Trussell, un humoriste qui a gagné en importance avec son podcast The Duncan Trussell Family Hour. Dans cette émission audio, il discute avec des personnes d’horizons variés, de sujets qui le sont tout autant. Grosso modo, la série d’animation qui les unit s’impose comme la fusion de leurs deux œuvres phares respectives : là où Pendleton Ward régale nos mirettes avec une animation hypercolorée, imaginative au possible, Duncan Trussell incorpore les réflexions de son podcast et invite à une introspection colossale.

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En guise d’exemple, le deuxième épisode de The Midnight Gospel envoie Clancy sur une planète lointaine, où il décide d’interviewer une créature étrange, ressemblant à un chien bleu. Les deux se font capturer par des sortes d’araignées déguisées en clowns et sont réduits à l’état de pâtés de viande difformes après avoir été placés dans un système de tubes façon usine – c’est hautement plus facile à regarder qu’à décrire, croyez-moi. Le monstre canin est doublé par la romancière Anne Lamott et parle avec Clancy de l’acceptation de la mort, inéluctable. Leur échange est en partie celui que l’on retrouve dans le podcast de Duncan Trussell, à quelques détails près pour coller à l’univers de la série.

Les premiers volets de The Midnight Gospel peuvent se révéler assez étourdissants, dans le sens où il ne semble pas y avoir de réel fil rouge pour consolider les épisodes. En prime, l’animation déroutante, parfois gore, malgré les couleurs très pop, n’est pas toujours en lien direct avec le propos de l’épisode, mais (presque) tout prend son sens lorsqu’on approche de la fin de la saison, avec un ultime chapitre qui amène à réévaluer notre perception du deuil. Tout ceci est à mettre en lien avec Duncan Trussell, dont le vécu personnel se réverbère dans la trajectoire de Clancy.

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Les pièces du puzzle se mettent alors en place. Tout ce qui était décousu est remis dans son contexte. Cela dit, la série n’offre pas de réponse à proprement parler : on ne sait jamais qui est vraiment Clancy, d’où il vient, comment fonctionne son simulateur ou même la planète sur laquelle il réside. Au fond, ce n’est pas là que se trouve la magie de The Midnight Gospel : c’est bel et bien dans les rencontres que fait son personnage principal et dans le savoir acquis résultant de ces échanges inattendus.

La série animée nous fait cogiter sur des thèmes comme la mort, le pardon, la spiritualité, l’espoir. Le vocabulaire employé peut s’avérer soutenu, poussant ainsi à une meilleure concentration sur ce qu’il se passe. D’ailleurs, si l’on pouvait penser que l’animation généreuse de The Midnight Gospel joue en sa défaveur et nous distraie du propos de l’épisode, c’est tout le contraire. Il se passe tellement de choses à l’écran que cette surcharge sensorielle encourage le spectateur à être pleinement focalisé sur ce qui se déroule et sur ce qui se dit. Un véritable tour de force, qui laisse bouche bée.

Alors non, The Midnight Gospel n’est pas une série accessible et beaucoup risquent de retourner sur la page d’accueil de Netflix après avoir visionné quelques minutes de cet ovni. Pour celles et ceux qui persévéreront, la récompense est de taille. Plus qu’un mindfuck gratuit, ce chef-d’œuvre singulier provoque une introspection ahurissante et assène un pur coup de grâce avec son dernier épisode, garanti de vous faire verser une larme et de laisser votre cerveau en PLS totale.

La première saison de The Midnight Gospel est disponible en intégralité sur Netflix.