De Dark à Westworld, 10 séries qui vont vous retourner le cerveau

De Dark à Westworld, 10 séries qui vont vous retourner le cerveau

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Ⓒ HBO

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Par Adrien Delage

Publié le

Freeze all motor functions.

Parce que c’est quasiment un genre en soi, dans lequel on adore se perdre (nous et Reddit) et élaborer des théories qui seront détruites par le prochain épisode, Biiinge s’est creusé le cerveau pour vous proposer une liste des séries les plus prises de têtes de ces dernières années. 

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Dark

Ⓒ Netflix

Si les scénaristes américains ont toujours excellé dans le genre du high concept, les Européens tiennent enfin leur revanche avec Dark. Avec cette série disponible sur Netflix, nos voisins allemands ont prouvé que la culture du mystère, une narration à base d’allers-retours temporels et une galerie de personnages foisonnante étaient désormais choses possibles dans nos contrées. Si Westworld est connue pour nous perdre dans sa chronologie, Dark est allée encore plus loin avec une saison 2 qui mélangeait pas moins de 5 temporalités différentes.

Comme toute série high concept ambitieuse, l’œuvre de Baran bo Odar et Jantje Friese séduit par la profondeur de sa mythologie. Dark cite Einstein et sa théorie sur la relativité du temps, mais aussi des passages de l’Apocalypse de Saint Jean avec un personnage de pasteur qui se fait appeler l’Homme en noir (poke le frère de Jacob et William). Les scénaristes s’amusent également avec les chiffres et leurs symboliques (des bonds dans le temps de 33 ans), et se basent sur des conventions scientifiques pour ne pas noyer le spectateur dans les éléments fantastiques (la centrale nucléaire). En fin de compte, Dark est tout simplement parvenue à s’approprier les codes d’une série culte telle que Lost pour mieux les réinventer. (A.D.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊💊

Les deux premières saisons de Dark sont disponibles en intégralité sur Netflix.

Fringe

© FOX

Celle qui démarrait comme un bon vieux formula show (un épisode = une enquête) inoffensif et gentiment teinté de SF, allait se muer, à mesure qu’elle étendait sa mythologie tentaculaire à travers des univers parallèles, en l’une des séries de networks les plus stimulantes intellectuellement depuis Lost, créée 4 ans plus tôt. Fringe, elle aussi produite par J.J. Abrams, débarque en 2008 sur FOX, et suit les aventures hors du commun de l’agent du FBI Olivia Dunham (Anna Torv) aux confins de la science. 

Elle, sceptique et badass, va croiser la route de Walter Bishop (John Noble), génie aussi drôle que visionnaire, et défiant les archétypes du savant fou, et son fils, Peter Bishop, sa boussole et son ange gardien. En semant des indices cryptiques dans ses épisodes (les fameux “glyphes” insérés entre les coupures pub qu’on a toutes et tous tenté de décoder), et en tricotant son univers (ou plutôt ses univers) avec une maîtrise qui frôlait l’insolence, Fringe nous a fait des nœuds au cerveau. Mais même pour celles et ceux qui étaient hermétiques aux théories, la série a su conquérir le cœur des fans grâce à la tendresse qu’elle portait à ses personnages extrêmement attachants. (D.R.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊

Les cinq saisons de Fringe sont disponibles à l’achat sur iTunes et Google Play. 

Legion

Ⓒ FX

En 2017, le scénariste Noah Hawley se lançait dans un pari risqué : renouveler le genre du super-héros, à l’heure où l’humour de Marvel et la noirceur de DC régnaient en maître sur les écrans. Pour ça, il choisit un personnage méconnu et torturé de la Maison des Idées et issu des X-Men : David Haller, aka Legion, le fils du Professeur Xavier. Si dans la promesse marketing la série devait être connectée à l’univers des mutants de la Fox, la proposition de Noah Hawley sera si arty et décalée qu’elle ne ressemblera en réalité à aucune autre œuvre super-héroïque.

Aux batailles toujours plus dantesques et aux crossovers toujours plus épiques, le showrunner de Legion a opté pour une approche bien plus intimiste et “auteur” du personnage incarné par Dan Stevens. Logique en quelque sorte, puisque la série nous plonge dans les méandres de l’esprit de David, habité par pléthore de personnalités différentes (et même un “virus” diabolique dans la première saison). De cette introspection presque viscérale, il en ressort une œuvre lynchienne extrêmement créative en termes de mise en scène et sibylline en termes de narration, si bien que de nombreux spectateurs ont abandonné avec la saison 2. Mais comme toujours avec les séries high concept, et Legion n’échappe pas à la règle, c’est le voyage plus que la destination qui importe. (A.D.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊💊💊

Les deux premières saisons de Legion sont disponibles sur MyCanal.

Les Revenants

© Canal+

Des séries françaises qui nous prennent la tête, il y en a un paquet, mais pas forcément pour les bonnes raisons ! En creusant bien, on trouve toujours des exceptions à la règle, comme cette œuvre signée Fabrice Gobert à l’atmosphère délétère unique en son genre. Lancée en 2012 sur Canal +, elle racontait le retour inexplicable de plusieurs personnes décédées à différentes époques, dans une petite ville française de montagne (coucou Twin Peaks) dominée par un lac artificiel, lui-même retenu par un immense barrage. Un pitch à mi-chemin entre Les 4400 et The Leftovers (sortie après). 

Sur une composition aussi planante que dépressive du groupe Mogwai, la saison 1 des Revenants réussissait habilement à empiler les mystères, tout en nous tenant en haleine avec des trames du genre le retour à la vie d’un serial killer, ou d’une jeune fille qui n’a pas vieilli, tandis que sa sœur jumelle oui. Drame intimiste et série à tiroirs, célébrée internationalement (un remake américain éphémère a même vu le jour), Les Revenants a connu un coup d’arrêt à cause de délais de production. Dépassés par le succès, Gobert et Canal+ ont fini par sortir la saison 2 pas moins de trois ans après la première. De quoi vous couler une série. Malgré des faiblesses, les derniers épisodes se tiennent et cette histoire s’achèvera sur un final déconcertant. En bref, on n’a pas tout compris mais que le voyage était beau et poétique. Et il a eu l’énorme mérite de compter une Céline Sallette à son bord. (M.O.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊💊

Les deux saisons des Revenants sont disponibles sur MyCanal. 

Lost

Ⓒ ABC

Si les plus vieux sériephiles confirmeront que Le Fugitif a créé le genre du high concept sur le petit écran dans les années 1960, d’aucuns n’oseraient contredire que Lost l’a relancé à notre époque. La série démiurge de J.J. Abrams, Damon Lindelof et Jeffrey Lieber est devenue culte pour la simple et bonne raison que, presque dix ans après sa conclusion, des dizaines de questions sont encore en suspens. Mais c’était tout l’intérêt de ses créateurs et des fans du show qui bombardaient les forums de théories capillotractées bien avant l’avènement de Reddit.

Lost fut l’une des (trop) rares séries qui reposaient sur un mystère global au cours de ses six saisons. Ses créateurs n’ont eu de cesse de creuser sa mythologie, à coups de flash-back et flash-forward, série chorale oblige. Avec ses personnages aux noms philosophiques et bibliques, ses concepts métaphysiques déboussolants, sa narration ultrarythmée à l’aide de cliffhangers et twists mortels, Lost jouait autant avec nos tripes que nos cerveaux. Mais c’est bien l’émotion au détriment de la raison qui a fini par l’emporter, comme le témoignent les discordes autour du series finale, encore sujet de discussions houleuses aujourd’hui. (A.D.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊

Les six saisons de Lost sont disponibles en intégralité sur Amazon Prime Video.

Maniac

© Netflix

Et si le bonheur était simple comme une pilule ? Trois pilules, pour être exact. C’est en tout cas le prétexte qu’a trouvé Patrick Somerville, le showrunner de Maniac, pour nous inviter dans son labyrinthe psychédélique dont Annie (Emma Stone) et Owen (Jonah Hill) sont les fils d’Ariane. Ils acceptent – pour des raisons qui leur sont propres – d’être les cobayes consentants d’une expérimentation scientifique. Le but de celle-ci ? Leur administrer trois pilules, en trois phases, pour les débarrasser du profond mal-être qui les empêche d’avancer.  

La mise en scène inspirée de Cary Joji Fukunaga agit comme un révélateur dans cette cacophonie mentale dont sont victimes nos deux protagonistes. Bienvenue dans les tréfonds de la psyché humaine, ses traumatismes, ses manques, ses systèmes de défenses… Toutes les barrières finissent par tomber dans Maniac, et l’envoûtement est quasi immédiat. À mi-chemin entre Legion et Eternal Sunshine of the Spotless Mind, la mini-série Netflix dissèque, à l’instar de son super ordinateur commandé par un Justin Theroux plus dérangé que jamais, nos mécanismes cognitifs sans jamais négliger les émotions. Celles de ses personnages, et les nôtres, mises parfois à rude épreuve. L’expérience est immersive, fascinante et laisse une empreinte quasi-indélébile sur nos rétines. (D.R.) 

Niveau de migraine : 💊💊💊

L’unique saison de Maniac est disponible sur Netflix.

Mr. Robot

“Hello friend.” C’est ainsi que nous découvrions un beau jour de 2015 le hacker Elliot Alderson (la révélation Rami Malek), bien décidé à mettre à mal le capitalisme avec ses potes de la Fsociety. Sauf qu’il n’est pas facile de se concentrer quand on doit aussi gérer un trouble dissociatif de l’identité. En proie à des hallus, le cyber-justicier va devoir apprendre à vivre avec son démon intérieur difficile à contrôler, le fameux Mr. Robot, qui prend les traits de son père abusif (et de l’acteur Christian Slater). Ça paraît simple comme ça, mais la série étant racontée du point de vue du peu fiable Elliot, par ailleurs complètement paranoïaque, elle nous embrouille comme jamais. Et on se demande constamment, un peu comme dans Matrix, si ce que nous montre cet antihéros au fond du trou est réel ou si c’est le fruit de son cerveau malade (métaphore de notre société).

Les complots, les personnages dans l’ombre qui retournent leurs vestes tous les deux épisodes et les enquêtes opaques ont fait en partie le succès de la série, mais son créateur Sam Esmail a aussi fini par perdre son public avec toutes ces intrigues sibyllines et ces mystères non résolus. Résultat, alors que l’ultime saison 4 de Mr. Robot est attendue le 6 octobre prochain et que ses problématiques sont toujours terriblement d’actualité (l’intimité et Internet), il n’y a plus grand monde – à part les fans hardcore qui discutent encore sur Reddit – pour se demander comment va finir notre pauvre Elliot. Parce qu’on a compris une chose : la société capitaliste est tellement tentaculaire et enracinée dans nos existences que même si on arrive à tout faire péter (comme en saison 2), il n’y a pas forcément de meilleure solution derrière – et donc il faut rebooter (saison 3). Entre-temps, on se sera bien fait enfumer par Phillip Price et Whiterose. Et on aura découvert un grand monsieur des séries : Sam Esmail, qui nous a depuis livré la fantastique et tout aussi parano Homecoming. (M.O.) 

Niveau de migraine :💊💊💊💊💊💊

En France, Mr. Robot est diffusée sur France 2, et les trois premières saisons sont sur Amazon Prime Video.

Rubicon

© AMC

Près de dix ans après son lancement sur AMC (et quelques mois plus tard en France, sur OCS), cette série n’a toujours pas révélé tous ses mystères. Annulée au bout d’une seule saison, faute d’avoir su rassembler assez de téléspectateurs·rices, Rubicon est pourtant, pour un petit cercle de sériephiles exigeant·e·s, une œuvre culte. Elle rejoint ainsi les éphémères mais brillantes Profit ou encore Freaks and Geeks au panthéon des séries qui auraient mérité tous les awards mais ont hélas été sacrifiées sur l’autel de l’audimat. Créée par Jason Horwitch en 2010 et showrunnée par Henry Bromell, la série nous fait suivre Will Travers (James Badge Dale), un analyste spécialiste du décryptage travaillant pour une agence indépendante de renseignements et de lutte contre le terrorisme.

Rubicon est une série qui se mérite. Exigeante, lente (mais pas chiante pour un sou) et intense (sans en faire des caisses), elle tisse sa trame avec les silences des personnages et les plans-séquences où la paranoïa prédomine. Peu bavarde, elle préfère la réflexion à l’action – ce qui lui a été autant néfaste que bénéfique. Un bijou d’autant plus précieux qu’il est rare : Rubicon n’est en effet ni sur OCS Go, ni sur les grandes plateformes de streaming, et trouver le coffret DVD de son unique saison relève de la chasse au dahu. C’est à se demander si on ne l’a pas imaginée… (D.R.) 

Niveau de migraine :💊💊💊

Après une enquête que ne renierait pas Will Travers, on a finalement trouvé la saison 1 de Rubicon sur iTunes.

The OA

© Netflix

Plonger dans les méandres de The OA, c’est faire un acte de foi. Il faut lâcher prise, du premier épisode au dernier, sinon, c’est foutu. Cette série n’est clairement pas faite pour tout le monde. Dans le meilleur des cas, elle fera de vous un·e converti·e, dans le pire des cas, vous la trouverez trop perchée, à la limite du ridicule. À son lancement en 2016 sur Netflix, l’ovni de Brit Marling et Zal Batmanglij a divisé la critique et le public. Mais l’engouement des fans, bien que trop discret hélas pour lui accorder une saison 3, ne s’est jamais démenti. Son annulation n’en a été que plus cruelle pour ces adeptes de la première heure.

The OA, c’est une mise à l’épreuve de notre cerveau rationnel. Et, comme les compagnons d’aventure de Prairie, notre héroïne, il nous réclame une disponibilité émotionnelle que nous ne sommes pas tous et toutes prêt·e·s à donner si facilement. Cette série, sous prétexte de voyages interdimensionnels dont les portails s’ouvrent grâce à l’énergie générée par une chorégraphie, explore le pouvoir de la foi et les liens entre des personnes, si forts qu’ils traversent le multiverse. On ne sort pas indemne de ces deux saisons. (D.R.)

Niveau de migraine : 💊💊💊💊

Les deux saisons de The OA sont disponibles sur Netflix.

Westworld

Ⓒ HBO

“Is this now ?”, s’interroge éperdument à voix haute Bernard pendant toute la durée de la saison 2 de Westworld. Comme un appel de détresse supposé briser le quatrième mur, le personnage incarné par Jeffrey Wright s’adresse directement au spectateur pour mieux perturber sa vision de la réalité. La narration sinueuse de Westworld, qui joue avec le temps mais aussi des concepts philosophiques et psychologiques complexes tels que la bicaméralité de l’esprit, a rarement autant fait surchauffer nos cerveaux devant un écran. Rien d’étonnant donc quand ces créateurs, Jonathan Nolan et Lisa Joy, disent piocher leurs inspirations dans Lost, le concept de “mystery box” développé par J. J. Abrams ou encore l’œuvre culte de Lewis Carroll, Les Aventures d’Alice au pays des merveilles.

Depuis deux saisons, cette œuvre de science-fiction pose des questions d’anticipation qui effraient autant qu’elles fascinent : le déterminisme humain, les modules de simulation, l’intelligence artificielle, le libre arbitre sont autant de thématiques explorées à travers des personnages à la psyché profonde. La grande force de Westworld réside dans sa capacité à créer davantage d’empathie à l’égard des androïdes plutôt que des humains auprès de ses spectateurs. L’intrigue fut jugée si obscure en saison 2 que le tandem de créateurs a choisi de lever le frein pour les futurs épisodes, dans l’espoir de remonter ses audiences et ne pas s’écraser comme une majeure partie des séries high concept. (A.D.)

Niveau de migraine : 💊💊💊💊

Les deux premières saisons de Westworld sont disponibles en intégralité sur OCS Go.

Un article écrit par Adrien Delage, Delphine Rivet et Marion Olité.