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Clique s’impose comme l’héritière stylisée de Skins

Clique s’impose comme l’héritière stylisée de Skins

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Par Florian Ques

Publié le

D’une esthétique travaillée à des protagonistes fascinants, Clique a tout bon avec un pilote audacieux aux faux airs de thriller psychologique.

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Elles sont grandes, élancées, bien sapées. Leur sourire Colgate, leur peau radieuse, leur regard oscillant entre vague désintérêt et condescendance assumée. Au lycée comme à l’université, voire dans nos vies professionnelles, on les a toutes déjà rencontrées. Difficiles à cerner, ces hordes de nanas populaires exsudent une confiance en elles à toute épreuve et, par-dessus tout, fascinent. Avec la toute fraîche Clique, Jess Brittain, un temps scénariste pour la cultissime Skins, se penche sur cet archétype intemporel, et ce qui en fait un tel objet de mystère.

Holly et Georgia sont des amies de longue date. Cette année, c’est la leur : elles sont à la fac d’Édimbourg depuis un mois et s’épanouissent comme jamais, collectionnant soirées trop arrosées et rencontres avec le sexe opposé. De fil en aiguille, elles se rapprochent d’une bande de quatre filles, aussi élitistes qu’intrigantes. Toutes sont stagiaires pour Jude McDermid, une professeure néo-féministe tout aussi mystérieuse, et semblent cultiver des secrets particulièrement sombres et dangereux. Les deux BFF vont alors être prise dans un engrenage qui risque de mettre en péril aussi bien leur amitié… que leurs vies.

À première vue, Clique pourrait très bien être le bébé spirituel de House of Cards et Gossip Girl : l’une pour sa dimension conspirationniste et son ton résolument dark, l’autre pour ses héroïnes hyperlookées et son côté glam exacerbé. La comparaison s’arrête là. En une quarantaine de minutes, la nouvelle fiction de la BBC Three réussit à poser les bases d’un pilote solide et s’achève sur une scène qui donne irrémédiablement envie d’y revenir.

Les personnages principaux, si peu originaux a priori, sont suffisamment esquissés pour qu’on ait envie de les découvrir davantage. L’héroïne de Clique, la discrète mais futée Holly, échappe au fur et à mesure du pilote au cliché de la narratrice trop effacée et, au bout du compte, fade. Son évolution, qui devrait plutôt ressembler à une descente aux enfers, a énormément de potentiel. En revanche, pour l’heure, le quatuor presque mystique au cœur de la série est peu étoffé. Les filles paraissent interchangeables tant leurs personnalités n’ont pas été encore dévoilées et exploitées.

Mais c’est un parti pris tout à fait logique. En refusant de nous présenter dans le détail ces “alpha girls”, la créatrice Jess Brittain forge une aura de mysticisme autour d’elles, renforçant l’aspect magnétique dont Holly et Georgia semblent être victimes. Le sujet choisi, bien que maintes fois évoqué dans bon nombre de longs-métrages et séries, est abordé sous un jour nouveau. Ces cliques 100 % féminines sont souvent représentées à l’écran comme des pestes méprisables ou bien tournées en dérision. Ici, Clique semble vouloir explorer ce qui rend ces meutes 2.0 aussi captivantes.

Des films passés incognito comme The Sisterhood of Night et le français Respire se sont également penchés sur ces personnalités féminines envoûtantes. Clique est probablement l’une des premières à le faire avec autant de justesse sur le petit écran. Il faudra cela dit tenir le rythme sur le reste des six épisodes qui constituent cette fournée inaugurale. Quoi qu’il en soit, c’est bien parti tant ce pilote ne s’essouffle pas et fait preuve d’une constance appréciable.

Pour couronner le tout, Clique se dote d’une esthétique poncée et bluffante. Les scènes de beuverie endiablée, notamment celle autour de la piscine intérieure, sont particulièrement léchées avec un éclairage façon néon (très en vogue chez les séries, pas vrai Riverdale ?). Les décors, les couleurs, les costumes… tout est mis en ordre pour créer une atmosphère à la fois glamour et oppressante. La B.O. éclectique et ultramoderne, avec des morceaux très Majestic Casual, contribue indéniablement à la réussite de ce pilote tant elle colle à cet univers.

On en avait parlé plus haut, Clique est le bébé d’une scénariste de la tant adorée Skins, et ça se voit. Ce portrait de la jeunesse, ces soirées de débauche où l’alcool coule à flot, ces rapports sexuels désinhibés… Les similitudes sont nombreuses. Entre kétamine et poudre blanche, les post-ados de Clique ont également un rapport étroit avec les substances illégales. Tant de points de convergence qui font de cette nouvelle série ambitieuse la digne descendante de notre Skins. Et au fond, on l’attendait depuis un bon bout de temps.