Drew Barrymore a les crocs dans Santa Clarita Diet, une comédie interdite aux vegans

Drew Barrymore a les crocs dans Santa Clarita Diet, une comédie interdite aux vegans

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Par Delphine Rivet

Publié le

Quand Desperate Housewives, iZombie et Dexter se téléscopent, ça donne l’étonnamment gore, mais néanmoins sympathique Santa Clarita Diet.

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The Z word

Sheila (Drew Barrymore) et Joel Hammond (Timothy Olyphant) ont une vie bien rangée. Les deux agents immobiliers vivent dans une banlieue cossue à Santa Clarita, et ils ont une adolescente, Abby (Liv Hewson), bien trop intelligente pour ne pas leur causer de souci. Mais du jour au lendemain, cette petite famille modèle va se retrouver dans l’œil du cyclone. Après une crise aussi soudaine que gerbante, Sheila réalise qu’elle n’émet plus aucun signe de vie.

C’est le gamin d’à côté, Eric, un vrai petit nerd comme on les aime, qui va guider notre héroïne dans sa transformation. Ce passionné de SF et de surnaturel a posé son diagnostique et lâcher le “Z word” : Sheila est un zombie. Elle a désormais toutes sortes de pulsions, dont certaines plus gênantes que d’autres. La libido en ébullition, ça, elle peut gérer. Et Joel ne voit pas de conflit moral à satisfaire son insatiable épouse. En revanche, il a un peu plus de mal, éthiquement parlant, à apaiser une autre faim qui la tiraille… Comme tout bon zombie, Sheila a besoin de chair fraîche, et humaine de préférence, pour se sustenter. Va falloir acheter un gros congélateur…

Gore me tender…

Créée par Victor Fresco, à qui l’on doit la bien trop méconnue Better Off Ted – qui adoptait déjà une forme classique (la “workplace comedy”), mais un ton résolument différent – Santa Clarita Diet est à la croisée des genres. Un décor et un contexte social à la Desperate Housewives, un régime alimentaire à la iZombie et un dilemme moral à la Dexter (ou comment tuer “utile”). Les quatre premiers épisodes sont hésitants, mais c’est une remarque que l’on pourrait faire à de nombreuses comédies, surtout les plus différentes, qui ont besoin de temps pour se trouver (on se souvient de la saison 1 de Parks and Rec). Des débuts relativement anodins dans la proposition donc (en dehors du côté gore, assurément unique), mais la suite permet d’installer le ton de cette comédie hybride.

Le jeu des acteurs gagne aussi en confiance et les répliques et autres exclamations paraissent plus spontanées. Au fil des épisodes, Santa Clarita Diet se libère, se décomplexe, assume ses vannes les plus connes et ses scènes les plus gerbantes, pour notre plus grand bonheur. On aimerait parfois qu’elle lâche un peu la bride et aille encore plus loin, mais l’intrigue à elle seule apporte une certaine satisfaction. Et bien sûr, c’est vraiment drôle.

Il faut un temps d’adaptation au téléspectateur aussi. On est peu habitué à voir Timothy Olyphant desserrer les dents dans une comédie (en dehors de sa rapide participation à The Grinder) et le jeu de Drew Barrymore paraît parfois exagéré, mais on adopte rapidement ce duo finalement pas si mal assorti. L’autre atout de la série, ce sont les deux adolescents, immédiatement attachants, Abby et Eric. Aspirés par le chaos qui entoure Sheila, ils vivent aussi leurs propres expériences, en marge de tout cela.

Ton corps change

Santa Clarita Diet est aussi une désopilante métaphore de la femme en pleine “midlife crisis” et se penche avec humour sur les transformations que peuvent traverser certaines femmes passée la quarantaine. C’est rafraîchissant de voir une comédie aborder cette métamorphose, après des années à explorer les desiderata d’anti-héros masculins en plein malaise existentiel dans les séries. On ne parle évidemment pas de ménopause, mais bien de changements émotionnels.

Sheila, en passant littéralement de vie à trépas, ne s’est jamais sentie plus épanouie. Mais l’horloge biologique, cette épée de Damoclès (qui est plus une construction sociale qu’une date de péremption réelle, heureusement) qui angoisse de nombreuses femmes, menace la félicité toute nouvelle de Sheila. Ce bonheur fraîchement retrouvé et qui lui donne envie de mordre la vie (et ses voisins) à pleines dents est fragile.

Il est intéressant de réaliser que c’est en “devenant” morte que Sheila se libère. Son cheminement féministe se fait sous certaines conditions plutôt… contraignantes. Le plus grand risque : la décrépitude. Il n’y a décidément aucun salut pour les femmes, même zombies : elles sont condamnées à devenir moins attirantes. Horreur ! Et pour Sheila, c’est carrément la putréfaction qui l’attend. Joel, le mari, a plutôt le beau rôle dans l’histoire. Il est compréhensif, veut participer aux nouveaux “hobbies” de sa femme, même si ça va contre sa propre morale ou le dégoûte. Et il lui jure de rester à ses côtés jusqu’au bout, quelle que soit l’issue.

Sheila et Joel sont des “high school sweethearts”, deux personnes qui se sont aimées dès le lycée et ne se sont jamais quittées depuis. C’est mignon, mais c’est aussi l’archétype du couple qui ronronne. La vérité, c’est que ces changements qui affectent toute la famille vont aussi la renforcer. Le couple formé par Sheila et Joel se découvre alors une quête commune. Et l’excitation de la chasse et de la préméditation, bien qu’amorale, va rebooster leur vie maritale jusqu’ici franchement plan-plan. La libido soudainement décuplée de Sheila va aussi aider, évidemment.

La saison 1 de Santa Clarita Diet est disponible depuis le 3 février sur Netflix.