Un vent de fraîcheur souffle sur les Emmys (et il était temps)

Un vent de fraîcheur souffle sur les Emmys (et il était temps)

photo de profil

Par Marion Olité

Publié le

On a souvent, et à raison, reproché aux Emmys d’être trop conservateurs, de s’entêter avec ses chouchous et de ne récompenser que les valeurs sûres. Cette année, les votants se sont retroussés les manches. 

À voir aussi sur Konbini

Évidemment, tout n’a pas été parfait. Dès les nominations, on a noté de grandes oubliées, comme l’exceptionnelle The Leftovers, injustement boudée, ou l’excellente You’re the Worst qui avait l’audace de s’attaquer au sujet de la dépression dans une rom com. La cérémonie a conservé ses chouchous, comme Julia-Louis Dreyfus, qui écrase depuis quelques années la concurrence en comédie avec Veep, ou Maggie Smith, une nouvelle fois récompensée pour Downton Abbey, alors que la série s’est achevée en décembre 2015 dans une relative indifférence.

Cela étant noté, le palmarès de cette année a plutôt fière allure. Justice a été rendue à Tatiana Maslany, qui incarne avec brio pas moins de douze clones dans la série Orphan Black depuis quatre ans. “I’m feel so lucky to be on a show that put women at the center” (“Je me sens tellement chanceuse d’être dans une série qui place les femmes au centre de son intrigue”) expliquera l’actrice de 30 ans, très émue.

Un autre “petit jeune”, Rami Malek, 35 ans au compteur, a raflé la mise face à des vétérans comme Kevin Spacey. Pour vous donner un aperçu du choc, il s’agit du plus jeune acteur à se distinguer dans cette catégorie (meilleur premier rôle masculin) depuis plus de quinze ans.

Please, tell me you’re seeing this, too”, lance un Rami Malek aussi étonné que nous, qui ne semble pas vraiment être sorti de son rôle du parano Elliot Alderson dans la déjà culte Mr. Robot. Il aura d’ailleurs un mot pour les personnes atteintes de troubles mentaux.

Et tant qu’on est dans le thème des injustices réparées, notons qu’en tournant dans American Crime Story, une autre série d’anthologie signée Ryan Murphy, l’excellente Sarah Paulson, qui brille dans American Horror Story depuis cinq saisons, a enfin remporté son premier Emmy pour avoir incarné la procureure Marcia Clark dans l’affaire O.J. Simpson.

Si FX et HBO ont indubitablement dominé la soirée, l’une avec American Crime Story, l’autre avec Veep et Game of Thrones, les plateformes américaines qui ont bouleversé ces dernières années l’industrie des séries ne passent plus inaperçues.

La très moderne Master of None d’Aziz Ansari et Alan Yang et le drama familial Bloodline ont été distingués pour Netflix, les kids de Stranger Things ont fait parler d’eux toute la soirée et la superbe Transparent a de nouveau fait des vagues chez Amazon. L’occasion pour sa showrunneuse engagée, Jill Soloway, de brocarder le patriarcat et pour Jeffrey Tambor d’appeler Hollywood à embaucher davantage de talents transgenres (Laverne Cox lui emboîtera le pas plus tard dans la cérémonie).

Pour ce qui est de la représentation des diversités, les Emmys s’en tirent mieux que d’autres années, avec deux acteurs et une actrice afro-américains récompensés : Regina King, Sterling K. Brown et Courtney B. Vance.

Enfin, le choix de sacrer Game of Thrones en tant que meilleure série (pour la deuxième année consécutive), est discutable : en général, ce prix va de paire avec une autre récompense d’envergure concernant les acteurs, ce qui n’est pas le cas ici. Il montre aussi la volonté des votants de ne pas donner dans le snobisme. Plus mainstream que Game of Thrones sur cette planète, c’est impossible. Et pourtant, la qualité de la série doit aussi être notée.

Cette cérémonie n’a pas été parfaite, et elle ne le sera probablement jamais. Mais les Emmys, à l’image de l’industrie des séries, évoluent. Peut-être pas aussi vite qu’on ne le voudrait mais ils le font et on ne peut que les encourager à continuer dans cette voie.