La série True Detective accusée de plagiat

La série True Detective accusée de plagiat

photo de profil

Par Louis Lepron

Publié le

Putain, je ne veux plus rien faire, jamais. Dans ce monde, rien ne se résout jamais. Une fois, quelqu’un m’a dit : “Le temps est un cercle plat”. Tout ce que nous avons fait, tout ce que nous ferons, nous allons le faire et le refaire sans fin. Et ce petit garçon et cette petite fille, ils vont rester dans cette pièce encore et encore, pour toujours.

À voir aussi sur Konbini

Ces mots, ces phrases, vous les reconnaîtrez peut-être. Des paroles proférées par Rust Cohle, l’un des deux personnages principaux de True Detective, incarné à l’écran par Matthew McConaughey. La série, qui voit sa deuxième saison se consolider progressivement, est au centre d’une polémique que personne n’attendait.
D’après le webzine LoverCraftZine, le créateur du show, Nic Pizzolatto, aurait plagié certains dialogues.

À la source de  Thomas Ligotti

Le titre de l’article est sous forme de question : “Est-ce que l’auteur de True Detective a plagié Thomas Ligotti et d’autres ?”. Mike Davis et Jon Padget, qui sont respectivement le rédac chef du site LoverCraftZine et le créateur d’un site fan dédié à Thomas Ligotti, ont analysé des répliques des personnages de True Detective.
Le problème, c’est qu’ils se sont rendus compte que certaines parties ressemblaient à des extraits d’un livre d’un romancier américain d’horreur, Thomas Ligotti, auteur il y a quatre ans du livre The Conspiracy Against The Human Race.
Dans son argumentaire, avant de comparer passages de Rust Cohle et passages du livre de Ligotti, Mike Davis attaque frontalement :

Ce qui est évident c’est que des idées, des mots et des phrases ont été prélevés directement du livre The Conspiracy Against the Human Race. Parfois il [Nic Pizzolatto, ndlr] a utilisé les mêmes citations, parfois il a changé un mot ici et ici, paraphrasant comme un étudiant qui tricherait lors d’une dissertation […]. Sans le travail de Thomas Ligotti, je doute que True Detective aurait été aussi loin.

On retrouverait aussi du William S. Burroughs (Ah Pook is Here and Others, publié en 1980) et même du Albert Einstein.
Mike Davis met notamment en avant une citation du scientifique :

Si les gens ne se conduisent bien que par peur d’être punis, et s’ils en attendent une récompense, alors nous formons une bien triste humanité.

Dans la série, elle devient, dans la bouche de Matthew McConaughey :

Si la seule chose qui fait qu’une personne reste convenable est l’espoir d’une récompense divine alors, frère, cette personne est un tas de merde.

Un problème de citation et de référence

Le problème aussi pour Mike Davis, c’est que Nic Pizzolatto a très peu cité Thomas Ligotti au cours de ses interviews et commentaires. Dans un article publié sur le site Arkham Digest, il explique :

Il aurait pu citer Ligotti un nombre incalculable de fois mais il ne l’a pas fait. Il en a simplement parlé lorsque les journalistes le mettaient devant le fait accompli. Dans les commentaires audio qu’il a enregistrés pour le DVD de la série, il n’a rien dit ? Nic Pizzolatto semble vouloir que le public pense qu’il est à l’origine de ces phrases et de ces idées.

Pour autant, comme le précise Mike Davis, Nic Pizzolatto, dans les bonus du DVD, fait mention de philosophes du 19ème siècle pour expliquer la pensée de Rust Cohle. Friedrich Nietzsche est souvent cité.
Mais à la question de savoir si le créateur de True Detective rendait hommage à l’auteur américain, Mike Davis a son idée :

Pas du tout. Un “hommage” suggère que Pizzolatto honorerait Ligotti ou lui montrerait une espèce de respect. Arracher le travail de Ligotti sans sa permission ou sans lui attribuer […] n’est pas une révérence.

Quoi qu’il en soit, cet article fait déjà réagir. Sur un blog d’Indie Wire, Greg Cwik explique que la notion de plagiat dans le monde de la culture et plus largement dans l’industrie du cinéma est floue, aux côtés de la référence assumée, de la citation et de l’hommage.
Et le journaliste d’évoquer une phrase du poète et dramaturge américain T. S. Eliot  :

Mediocre writers borrow. Great writers steal.