Sherlock est de retour dans un épisode mi-figue, mi-raisin

Sherlock est de retour dans un épisode mi-figue, mi-raisin

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Par Marion Olité

Publié le

Sherlock est enfin de retour aux affaires dans le premier épisode de la saison 4, “The Six Thatchers”. L’attente valait-elle le coup ? Attention, spoilers. 

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Presque trois ans qu’on attendait ça. Si l’on efface l’épisode Christmas Special de l’an passé, “The Abominable Bridepetite friandise bien foutue pour faire patienter les fans, Sherlock Holmes n’avait pas pointé le bout de son deerstalker depuis mars 2014 et une saison 3 aux retours critiques contrastés.

Où en était-on, déjà ? Ah oui. On avait laissé le détective en train d’abattre son dernier ennemi, Magnussen, puis de s’envoler vers une destination inconnue, tandis que tous les écrans de Londres dévoilaient le visage de Moriarty et ce message : Did you miss me ?” Finalement donc, Sherlock est réquisitionné par son frère Mycroft, au nom du gouvernement anglais, pour contrer la menace de son ennemi juré, prêt à refaire des siennes, même mort.

En deux temps, trois mouvements, notre anti-héros est exonéré du meurtre de Magnussen et peut réintégrer le 221B Baker Street. Obsédé par Moriarty, qui semble lui avoir laissé un nouveau jeu macabre post-mortem à résoudre, le détective devient entre temps tonton et résout vingt millions d’affaires, avant de tomber sur une énigme bien plus retorse, incluant des bustes à l’effigie de Margaret Thatcher.

L’usure du temps

Autant vous prévenir : les 45 premières minutes de mise en place ne sont pas franchement mémorables. On a beau adorer le personnage de Sherlock, que Benedict Cumberbatch a brillamment fait sien, l’acteur cabotine ici à tous les niveaux. Son comportement de troll est tellement poussé au maximum qu’il frôle le ridicule, avec des scènes tristement prévisibles du genre : Sherlock version tonton ne comprend évidemment pas la petite chose qui se tient devant lui.

Après tant de saisons, il est évident que ce genre de personnalité caustique (qui n’est pas sans rappeler Dr. House) qui évolue très lentement a tendance à lasser. Il faut alors d’autant plus de vigilance du côté des scénaristes pour éviter de faire de Sherlock une caricature de lui-même. On peut faire ce même reproche à la réalisation, signée Rachel Talalay.

Elle se veut toujours aussi soignée, mais elle multiplie les effets de style parfois vides de sens, sans nous révéler quoi que ce soit d’autre que l’on ne voit déjà à l’écran. On est loin de la subtilité de la réalisation d’un Paul Mcguigan, à qui l’on doit plusieurs épisodes mémorables (“The Great Game”, “A Scandal in Belgravia”, “The Hounds of Baskerville”). Encore une fois, l’usure du temps fait aussi que ce qui nous paraissait extraordinaire en 2010 (du genre les textos ou la carte de Londres qui s’affichent en surbrillance) ne l’est plus vraiment six ans plus tard.

Un sursaut tardif

C’est donc après le one man show vu et revu de Sherlock pendant près d’une heure que l’intrigue se pose enfin dans des recoins intéressants. Et c’est quand le personnage de John Watson (Martin Freeman, toujours parfait et nuancé) a droit à un peu de lumière — on le découvre à travers son couple loin d’être parfait, ses doutes de jeune papa — que le show trouve son rythme de croisière et s’aventure dans des sentiers moins battus.

On s’agacera cela dit du comportement assez macho et réac de Sherlock, qui ne cesse de vouloir protéger Mary (Amanda Abbington) parce qu’il en a fait le serment. Sans compter les derniers mots de Mary à Watson : “Tu m’as donné tout ce que j’ai pu désirer. Tu étais tout pour moi. Être Mary Watson est la seule vie qui valait le coup.” Traduction : mon plus beau rôle a été d’être mère au foyer ! Les romantiques verseront une petite larme, les féministes lèveront les yeux au ciel. 

Et les créateurs auront probablement la réponse toute trouvée à cette critique : vu le dénouement de l’histoire, c’est bien Sherlock qui avait finalement besoin d’être protégé. Ce final va remettre en question sa vision des choses et Mary est bien plus badass que ses deux compagnons masculins réunis. Certes. 

Sans trop en dévoiler, la fin de l’épisode amorce un tournant plus sombre, d’ailleurs annoncé par ses créateurs, pour la suite de cette saison 4. Et une nouvelle dynamique dans le duo Watson/Holmes. Tant mieux. En attendant le deuxième épisode, dans lequel le détective affrontera l’un de ses pires ennemis, Culverton Smith (Toby Jones), il faut bien avouer que ce retour aux affaires manque cruellement d’homogénéité. C’est encore plus frustrant compte tenu de son gros potentiel de charge émotionnelle.