On a parlé de la saison 3 de The Handmaid’s Tale avec sa star, Elisabeth Moss

On a parlé de la saison 3 de The Handmaid’s Tale avec sa star, Elisabeth Moss

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Par Florian Ques

Publié le

L'héroïne de la série la plus glaçante de ces dernières années est revenue sur son impact et son parallèle troublant avec l'actu.

Révélée dans la mémorable Mad Men, Elisabeth Moss rayonne depuis maintenant trois saisons dans l’une des productions les plus effroyables de la décennie. Il s’agit bien entendu de The Handmaid’s Tale, qui épouse de manière beaucoup trop tragique les récentes polémiques relatives aux droits des femmes aux États-Unis. De passage à New York pour promouvoir la saison actuellement en diffusion sur OCS en France, l’actrice a bien voulu revenir sur la pertinence de son rôle et nous teaser les intrigues à venir.

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Biiinge | Travailler sur la série a-t-il changé votre façon de voir le monde, notamment en rapport avec l’activisme et les droits des femmes ?

Elisabeth Moss | Vivre cette expérience pendant sept mois de tournage même si ça prend peut-être toute l’année au final [rires] , c’est obligé que ça te touche intimement et que ça te connecte avec la réalité du monde autour de toi et tout ce qui s’y passe. Surtout en devant constamment traiter les storylines qu’on traite et en traversant ce que traverse mon personnage. Je ne peux pas décrire ça autrement que par un sentiment d’une connexion profonde avec ce qui se passe là dehors. Et une certaine conscience des choses, je suppose, qui est inévitable et je suis contente que ce soit inévitable.

Est-ce que June vous a rendue plus forte, plus courageuse ?

Elle m’inspire, oui, c’est vrai. Je pense qu’on espère tous pouvoir être aussi fort·e·s qu’elle si on était dans les mêmes circonstances. Et je pense que ce qui est inspirant chez elle, c’est qu’elle n’est pas une super-héroïne. C’est une femme ordinaire. C’est une épouse, une mère, une meilleure amie, une femme. Elle n’est pas parfaite, elle a des défauts, elle est vulnérable et elle fait des erreurs. Surtout cette saison, où elle fait des choses moralement douteuses.

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On n’a vu que les trois premiers épisodes jusqu’ici.

Eh bien, vous n’avez encore rien vu. C’est dur de parler de cette saison parce que vous n’avez vu que le début, et ce qui se passe dans la seconde moitié de la saison est tellement différent. Ça va être un grand huit émotionnel pour vous. C’est difficile. Mais bref. [Elle fait une pause.] Elle m’inspire parce que j’aime croire que je pourrais être aussi forte dans une situation comme la sienne. J’espère que je pourrais être aussi focalisée, que je pourrais vivre de la même manière qu’elle. Je me sens fière quand j’enfile son costume et oui, ça m’apporte de la force.

J’ai entendu dire que c’était en partie votre choix, à la fin de la saison 2, de faire croire que June allait vraiment s’échapper pour au final nous montrer que non, pas du tout. À quel moment avez-vous pris cette décision ?

Oui, ce n’était pas mon idée, mais j’ai pensé que c’était vraiment bon et complexe et intéressant que je voulais pousser ça aussi loin que possible. On voulait prendre des éléments du script et vraiment les accentuer au maximum. […] Je crois que c’était mon idée qu’elle mette la main sur la portière, qu’elle soit sur le point de grimper à tel point qu’on y croit vraiment. Puis elle lâche sa dernière ligne et claque la portière. Je voulais que ce soit le plus frustrant possible. On savait qu’on allait énerver des gens, on savait que certains allaient vouloir nous tuer. Mais ça devait être fait.

L’un des aspects les plus fascinants de la série est la relation entre June et Serena. Cette saison, Serena montre un côté plus vulnérable de sa personnalité, et June se montre plus empathique, plus amicale envers elle. Est-ce qu’elle est honnête dans sa démarche ou bien est-ce qu’elle la manipule pour l’avoir comme alliée ?

Je pense que c’est quelque part entre les deux. Je ne crois pas que ce soit de la manipulation, elle reconnaît surtout en Serena une potentielle alliée et elle se sert de ça pour la bonne cause. Elle comprend, ou du moins elle pense comprendre, Serena. Elle est convaincue qu’elle va prendre la bonne décision. Et oui, il se trouve que c’est en accord avec June et sa cause. Mais elle croit sincèrement que Serena fera preuve de bonté. Que ça se goupille bien pour elle ou non, ça reste à voir…

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Cette saison, certains personnages se rendent à Washington, où on peut dire qu’il y a une approche encore plus fondamentale de la religion. Quel effet ce séjour va-t-il avoir sur June ?

Il y a à peu près quatre choses majeures qui se passent pour June dans le sixième épisode et qui la pousse vers la seconde moitié de saison où un arc narratif plus important démarre. D’une part, elle comprend que Nick lui a caché des choses, des choses très graves. Elle se fait briser le cœur par Serena c’est comme une rupture, c’est comme ça qu’on l’a abordé. Elle réalise que les choses à Gilead peuvent encore empirer. Et puis la quatrième chose, c’est quand elle prend conscience qu’elle n’a pas autant de temps que ce qu’elle pensait. Que l’horloge tourne et qu’il y a des gens qui emménagent et qui vont lui compliquer la tâche. Ça va être beaucoup plus difficile pour elle de faire ce qu’elle a à faire. C’est un épisode décisif qui lance ce qui va se passer dans la seconde partie de la saison 3.

De quelle manière ce qui se passe dans la vraie vie, en Alabama ou en Géorgie, influe sur votre ressenti de cette saison et de votre personnage ?

Je veux dire, pour moi, j’ai l’impression que la série est un bon exutoire pour tout ce que je ressens. C’est une bonne façon d’exprimer mes sentiments et de prendre position. Je n’ai jamais pu faire ça à un tel point jusqu’ici dans ma carrière, donc ça rajoute une couche intéressante par-dessus mon travail. J’espère que les gens qui se disent “oh c’est effrayant à quel point cette série est pertinente avec l’actualité” se serviront de cette peur pour agir et faire changer les choses.

Vous êtes aussi productrice sur la série. Comment vous jonglez entre vos deux rôles, actrice et productrice ?

Ils existent en parallèle de façon assez fluide et fonctionnent vraiment l’un avec l’autre. Surtout maintenant, après trois saisons, je trouve qu’ils sont connectés. Je ne me dis pas “ça, c’est une décision de productrice” ou “ça, c’est une décision d’actrice”. Je dirais quand même que le job de productrice est plus important que celui d’actrice, ce qui est assez fou dans le sens où je suis dans presque toutes les scènes [rires] . La partie actrice est fun, la partie productrice est plus difficile.

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Cette saison, Les Marthas et les Handmaids commencent à se rapprocher. Est-ce que vous pensez que dans la vraie vie, un rapprochement est en train de s’opérer entre les femmes de différentes classes sociales, de différentes ethnies ?

Je l’espère, oui. Je crois que c’est le cas. Je pense que les femmes peuvent se réunir et se réunissent autour d’une cause commune, qu’importe si leurs vies sont différentes, leur origine ou les expériences qu’elles ont pu avoir. Je pense qu’il y a un consensus autour des choix, de la liberté et des droits qui unit les gens, et c’est ça qui rapproche ces femmes à Gilead. Mais même si elles sont issues de milieux différents, même si elles ont des objectifs différents, elles savent qu’elles veulent avoir le choix, elles veulent l’option de pouvoir faire ce qu’elles ont envie de faire.

Et à Gilead d’ailleurs, on voit que certaines femmes sont complices du système.

Oui. C’est ridicule, vraiment. […] Gilead appelle les gens qui sont gays des “traîtres pour leur genre”. Et je pense qu’il y a plus d’un seul type de “traître de genre”, et je pense que bon nombre de ces femmes vous savez, ces femmes qui soutiennent Gilead, qui soutiennent le viol systémique des Handmaids et le fait qu’on leur ait enlevé tous leurs droits en sont un bon exemple. Enfin, comment est-ce que leurs actions ne constituent pas une trahison envers leur genre en tant que femmes ? Donc voilà, je laisse ça là [Rires.].

La saison 3 de The Handmaid’s Tale est diffusée sur OCS en France.