Gomorra : en saison 4, Gennaro tente une percée explosive dans la légalité

Gomorra : en saison 4, Gennaro tente une percée explosive dans la légalité

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Par Adrien Delage

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En saison 4, l'héritier du clan Savastano quitte Secondigliano et se lance dans l'immobilier.

Gomorra, plus populaire que Game of Thrones sur le petit écran italien, s’évertue avec succès depuis quatre saisons à dépeindre la violence et le mal qui rongent les rues de Naples. Cette région de la Campanie est secouée par le trafic de drogue et les conflits sanglants entre gangs rivaux, qui se sont soldés par la mort de son antihéros principal, Ciro Di Marzio, dans le final de la saison 3. Le leader charismatique du show a été assassiné, ou plutôt s’est sacrifié pour la paix et le bien de son élève et frère d’armes, Gennaro Savastano, désormais leader de Secondigliano.

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Passé maître dans l’art des retournements de situation, le créateur Roberto Saviano a choisi de rebattre une énième fois ses cartes en saison 4. Fatigué des guerres incessantes qui perturbent le business et mettent sa famille en danger, Genny décide de quitter son quartier natal, laissant les clés de Secondigliano à sa seconde, Patrizia. L’héritier du clan Savastano se replie dans une région proche de Naples mais plus calme, afin de combler sa femme Azzurra, éduquer son fils Pietro et surtout se ranger dans la légalité, avec un objectif très ambitieux : créer le plus grand aéroport de la Campanie.

Chassez le naturel, il revient au galop

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Roberto Saviano est fasciné par le mal, qui prend de multiples facettes dans Gomorra. Alors forcément, on le voit d’ici rire jaune quand il nous fait croire qu’un an a passé et que Gennaro est devenu un homme d’affaires modèle. En s’entourant de puissants politiciens et entrepreneurs pour mener à bien son projet, Genny se rend compte que même dans les hautes sphères, le mal règne. En quittant son quartier et ses conflits street level, le mafieux n’a fait que déplacer son problème pour mieux le récupérer en pleine poire : son naturel reprendra toujours le dessus, peu importe le contexte.

L’épisode 2 de la saison 4 de Gomorra est brillant, de ceux qui se jouent dans les esprits diaboliques de nos mafieux et prennent la forme d’une tragédie grecque. On est d’abord ému face au chagrin de Gennaro, qui parvient difficilement à faire le deuil de Ciro et retourne empli de nostalgie, macabre certes, sur les lieux de son premier meurtre. On est ensuite amusé de le voir négocier pour construire son aéroport, soulignant ses bonnes intentions d’une réplique cinglante : “Tutto deve essere fatto legalmente” (“tout doit être fait dans la légalité”).

Et puis Genny se frotte au premier obstacle et découvre la réalité de la situation lorsque son partenaire Alberto lui conseille d’employer la manière forte vis-à-vis d’un paysan qui refuse de vendre son terrain. On est alors partagé entre un sentiment de terreur et de jouissance devant le génie diabolique de Gennaro, qui se sert du cancer de la femme du forgeron pour le manipuler. Une intrigue qui traduit toute la vision de Roberto Saviano, certes pessimiste, d’une humanité pervertie, à travers ces mafieux filmés comme des dieux se disputant le mont Olympe.

On retrouve d’ailleurs dans une séquence absurde (mais géniale) et tragicomique toute l’opulence et le baroque de la Camorra. Déterminé et malicieux comme jamais, Genny débarque sans prévenir dans la classe de son fils avec une troupe de clowns pour fêter son anniversaire. Face à cette scène surréaliste, les visages des parents sont à la fois fascinés et horrifiés, tandis que Gennaro réussit son pari : gagner le respect de ses voisins et leur montrer qui est le nouveau shérif en ville. Salvatore Esposito brille une nouvelle fois dans son rôle, les fans exultent devant tant d’assurance et on en oublierait (presque) la disparition de Ciro.

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Contrairement à certaines séries récentes et populaires comme The Walking Dead et Vikings, Gomorra survivra sans difficultés à la perte de son leader. Le talent d’écriture des scénaristes du show a permis à Gennaro d’éclore pleinement, de moineau apeuré en saison 1 à parrain magnétique et impitoyable en saison 4. La série italienne revendique également une réalité brute, parfois même un peu froide en termes de mise en scène, qui nous prépare à affronter le pire à chaque instant. C’était le cas de Ciro en saison 3, dont on sentait l’arc narratif se refermer petit à petit – sans que ça tombe dans le dramatique – et une franche déclaration d’amour au personnage.

Avec cette nouvelle saison, Gomorra va repousser ses frontières et multiplier les points de vue : Patrizia, Enzo et l’oncle de Genny continueront de gérer le business de Secondigliano, tandis que le fils prodigue des Savastano partira à la conquête de l’Europe, avec un arrêt important à Londres. En seulement deux épisodes, on retrouve tout ce qui fait la force de cette œuvre mafieuse : un leader fascinant, beaucoup d’émotions, des personnages et des situations imprévisibles, des voitures qui crament (très important) et surtout un sous-texte à la fois glaçant et captivant sur la part sombre qui réside en chaque être humain. Forza Gomorra.

En France, les épisodes de la saison 4 de Gomorra sont disponibles sur MyCanal 24 heures après la diffusion italienne.