The Society, un monde sans adultes hautement perfectible

The Society, un monde sans adultes hautement perfectible

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Par Florian Ques

Publié le

Netflix nous gâte avec un énième teen show audacieux qui laisse, malgré tout, un goût d'inachevé.

Un monde sans adultes, soit sans aucune supervision ni la moindre limitation, voilà un concept qui a forcément fait saliver au moins une fois tout adolescent normalement constitué. Car avec cette idée qui relève presque du fantasme, on s’imagine une dimension alternative où la liberté est à son paroxysme, où les contraintes s’envolent pour laisser place à une satisfaction instantanée, un état de carpe diem constant. Les rois du monde, tout ça, tout ça, en somme. Sauf que, comme nous le prouve The Society, ce genre de quotidien n’a rien de reluisant.

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Vendue comme une adaptation libre de Sa Majesté des mouches signée William Golding, The Society démarre selon le postulat évoqué plus haut : dans une petite ville de Nouvelle-Angleterre, plusieurs classes de lycéens embarquent pour une sortie scolaire. Suite à des complications, leur voyage est avorté et les bus les reconduisent au point de départ. Mais quelque chose a changé en leur absence. En effet, tout le monde a disparu et ils sont désormais les seuls à habiter ici.

Sur le papier, le synopsis de cette nouvelle série Netflix fait écho à Under the Dome, qui s’affairait, elle aussi, à suivre un groupe de personnes livrées à elles-mêmes, coupées du monde à cause d’une sphère transparente et infranchissable cernant la ville. Ici, pas de dôme mystique. À vrai dire, les raisons de cet isolement forcé restent l’une des zones d’ombre majeures dans The Society qui, plutôt que de tomber dans le fantastique pur et dur, préfère mettre l’accent sur le côté humain et les liens interpersonnels.

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Bon, avant de vanter les quelques mérites de The Society, il faut obligatoirement mentionner son épisode inaugural qui s’avère déplorable à bien des niveaux. Les dialogues sonnent faux, d’autant plus dans la bouche de comédien·ne·s qui font le minimum syndical. L’intrigue est globalement mal amenée, tirée vers le bas par des personnages qui ont des réactions toutes plus incohérentes les unes que les autres. Moi, frustré ? Pour le coup, un peu, car j’avais bon espoir en The Society lorsque la série a été mise en chantier il y a de longs mois de ça.

Si j’étais enthousiaste à l’idée de découvrir ce teen show “postapocalyptique” (les guillemets sont de rigueur puisqu’il n’y a pas de catastrophe façon The 100 à proprement parler), c’était parce que son pitch me faisait penser à Gone, une série de romans écrits par Michael Grant. Cette saga littéraire cruellement sous-estimée, qui n’a pas eu le succès escompté dans notre Hexagone, dépeignait aussi une ville où tous les adultes s’étaient mystérieusement évaporés. Bien qu’elle assumait davantage son côté fantastique, la franchise Gone est l’une des plus addictives qu’il m’est arrivé de lire. Comment l’expliquer ? Grâce à des personnages attachants et écrits de façon humaine.

The Society aurait pu en prendre de la graine, puisque la majorité de ses personnages – et croyez-moi, ils sont nombreux et paraissent assez interchangeables dans un premier temps – ne suscitent aucune empathie. On a l’impression de faire face à des archétypes, à des cases à cocher, plutôt qu’à de véritables personnages. À mi-parcours des dix épisodes qui composent sa première saison, je me demandais pourquoi je m’infligeais ça car le niveau de la série est, dans son ensemble, médiocre.

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Et puis, par je ne sais quel miracle, The Society a commencé à décoller. Attention, ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas d’un décollage furtif où l’on en vient à se dire qu’on est face à un chef-d’œuvre sans pareil. Loin de là. Mais plus les épisodes s’enchaînent, plus on discerne les qualités de la série. Cette dernière dresse le portrait d’ados qui, une fois le choc initial passé, tentent de repartir de zéro en formant une nouvelle structure sociétale. Des questions fondamentales sont alors soulevées : prendre le pouvoir par la force ? Établir un fonctionnement démocratique ? Quid du système juridique, de la contribution individuelle et du maintien de l’ordre ?

Non, The Society n’a pas la prétention d’être une œuvre philosophique, mais elle soulève des questions intéressantes quant aux schémas sociétaux qu’on hérite. La série se montre par ailleurs généreuse avec ses personnages féminins qui, même s’ils sont nombreux, parviennent à se distinguer les uns des autres et à avoir des storylines abouties. A contrario des garçons qui, sauf exception, pâtissent d’une certaine prévisibilité et ont du mal à être plus que de simples stéréotypes sur pattes.

Pour la faire simple, The Society a de bonnes idées qu’elle peine à exploiter avec justesse et qui sont d’ailleurs desservies par une façon de filmer des plus impersonnelles – comprendre par là qu’il n’y a aucun parti pris esthétique et de rares efforts quant à la photographie. Malgré tout, la série s’améliore au fil des épisodes et parvient à se débarrasser de certains de ses travers. C’est laborieux, mais The Society prend un virage plaisant dans son dernier chapitre, nous donnant presque envie d’oublier ses multiples imperfections pour espérer qu’une saison 2 voie le jour.

La première saison de The Society est disponible dès maintenant en intégralité sur Netflix.