Toy Boy, un plaisir coupable, avec une conscience sociale

Toy Boy, un plaisir coupable, avec une conscience sociale

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Par Willy Alliot Jacques

Publié le

Pour les amateurs de "Magic Mike".

Le mercure grimpe sur Netflix ! Pour sa troisième série espagnole, la plateforme nous emmène en direction du soleil et de la plage, sur La Costa del Sol, dans la cité balnéaire de Marbella. Cinq jeunes hommes aux corps bronzés et parfaitement sculptés font tomber la chemise et le pantalon au club Inferno. Ces cinq strip-teaseurs font le show, dans l’esprit d’un Magic Mike qui laisse grandement place au thriller. Hugo Beltrán (incarné par Jesús Mosquera), fait partie du groupe. Le jeune homme a tout pour plaire, surtout à la bourgeoisie marbellienne, qui en fera son toy boy (“homme objet”), usé, abusé, et enfermé en prison pour une sordide histoire de meurtre.

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Si vous n’avez pas encore adhéré à ce plaisir coupable, Netflix a sorti un atout majeur : la jeune actrice en pleine ascension María Pedraza, aka Alison Parker dans La Casa de Papel et Marina Nunier Osuna dans Elite. C’est parti pour 20 heures de binge-watching, qui vous feront un peu oublier ce long confinement.

Toy Boy dispose de plusieurs niveaux de lecture. Série légère et divertissante, elle met en scène des love stories contrariées, où l’amour finit toujours par triompher des épreuves. Hugo aime Triana, son avocate, qui ne veut pas se laisser séduire par son client, son métier de strip-teaseur ne jouant pas en sa faveur. Il a aussi un ami, Ivan, amoureux de sa belle-sœur, toujours en couple. Les sentiments sont réciproques, mais difficiles à vivre au grand jour. Tous ces entremêlements d’histoires compliquées rassurent par leurs ressorts prévisibles, au même titre que l’intrigue policière, ronronnante avec ses twists lourdement menés. Au moins, on ne perd personne en route et le cerveau reste débranché.

Satire sociale et (timide) inclusivité

À y regarder de plus près, César Benítez, Juan Carlos Cueto, Rocío Martínez Llano, les créateurs de Toy Boy, ne se seraient-ils pas lancés dans un Zola à la sauce XXIe siècle ? Le thème de la lutte des classes s’inscrit clairement, en toile de fond. Au milieu d’une bataille financière entre les deux plus riches familles de Marbella, Hugo et son avocate tentent d’obtenir justice et réparation. Ils se heurtent, inévitablement, au déterminisme social. Seuls, ils n’appartiennent à aucun clan. Ils ne possèdent rien. Les institutions fantoches agissent contre eux. Leurs représentants sont à la botte des puissants.

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À sa manière, un autre couple phare de la série, incarné par Andrea et Jairo, tente de faire exploser les barrières sociales. La série déroule une histoire d’amour gay, naissante et tourmentée. Un peu trop tourmentée, d’ailleurs. Le personnage d’Andrea est complètement surjoué, mais si la relation s’avère compliquée, ce n’est pas en raison de l’homosexualité des deux hommes. Aucun membre de leur entourage ne s’en offusque. C’est bien la différence de classe sociale qui pose problème.

Si la série aborde des sujets intéressants, elle reste en revanche très timorée quand il s’agit d’aborder la sexualité queer. Les baisers gays sont longs à venir, tandis que les scènes de sexe hétéro sont plus nombreuses et plus travaillées. La représentation des sexualités LGBT+ se résume à la prostitution et aux orgies. Il ne s’agit pas ici de nier une réalité, mais de rappeler que c’est aussi celle des hétérosexuels.

Chose rare, les femmes représentent, dans Toy Boy, le pouvoir, en matriarches de clans mafieux. Dommage que leur vie de couple soit compromise, comme si la présence d’un époux venait forcément questionner leur autorité. À noter également, la présence d’un personnage de premier plan muet (Jairo incarné par l’acteur non-muet Carlo Costanzia), qui permet à la série de cocher la case inclusivité. On applaudit l’effort général de la série, qui souhaite porter haut et fort l’étendard de la diversité, même si elle ne va pas forcément toujours au bout de ses convictions.