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10 looks iconiques de séries qui ont marqué les années 2010

10 looks iconiques de séries qui ont marqué les années 2010

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Par Delphine Rivet

Publié le

De la servante écarlate à Heisenberg, en passant par Daenerys.

On sous-estime trop souvent l’impact que peut avoir un costume dans une série. C’est pourtant lui qui aide à façonner un personnage en donnant naissance à une silhouette et, parfois même, à un symbole. Des allures, de la plus minimaliste à la plus sophistiquée, qui rendent ces héros et héroïnes reconnaissables en un coup d’œil. En voici dix qui ont, selon nous, marqué la décennie.

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The Handmaid’s Tale, Offred

© Hulu

S’il y a bien une silhouette qui s’est gravée dans nos rétines de sériephiles, c’est celle-là. Une coiffe blanche, une longue cape rouge et des boots en cuir à lacets. Simple, basique, comme dirait l’autre. Le costume des servantes écarlates a d’abord existé entre les pages du roman de Margaret Atwood, puis au cinéma et au théâtre. Mais il a fallu attendre qu’Ane Crabtree, la costumière de la série, s’en empare pour qu’il devienne un véritable symbole. Ces femmes doivent porter leur servitude et leur fertilité à l’extérieur.

La coiffe les oblige à baisser la tête et rend difficiles les interactions entre elles, et l’habit rouge rappelle le sang des règles. La tenue d’Offred est devenue plus grande encore que le personnage pour lequel elle a été imaginée. Tour à tour, diverses institutions américaines où se jouait le droit des femmes à disposer de leur corps ont vu leurs couloirs hantés par des servantes, silencieuses ou non, venues protester. On les a vues aux rassemblements du parti républicain, sur les marches du Capitol, ou lors de l’affaire Kavanaugh. Un costume qui inspire la résistance au patriarcat, ça n’est jamais “que” de la mode.

Mad Men, Don Draper

© HBO

Coupe impeccable, taillée sur-mesure, et cravate fine, le costume du plus célèbre des pubards est tellement représentatif du personnage que c’est lui qui symbolise Don Draper dans le générique. On ne voit pas l’acteur Jon Hamm, mais une version animée, en noir et blanc, de sa silhouette. Dans la série, le publicitaire de génie arbore un look qui frôle la perfection, même la pochette est soigneusement rangée pour ne laisser dépasser qu’une mince bande de tissu. Rien ne dépasse, pas même une mèche de cheveux.

Sauf que tout le monde a depuis percé le mystère Don Draper : antihéros par excellence qui a fait les beaux jours de la télé câblée du début des années 2000, l’homme derrière le costume parfait est un réservoir à névroses. Son look sophistiqué, c’est l’illusion de sa domination à laquelle il se raccroche quand tout fout le camp. S’il a inspiré à plus d’un un retour à la bonne vieille misogynie des années 1950 — du temps où on pouvait fumer dans les avions, s’enfiler un bon whisky en première classe et foutre la main aux fesses de l’hôtesse qui n’a rien demandé —, Don Draper représente surtout le naufrage de cette masculinité hégémonique.

Breaking Bad, Heisenberg

© AMC

Si Walter White nous est d’abord apparu en slip et chemise verte, sur le bord de la route et en plein désert, c’est surtout sa transformation en son alter ego Heisenberg qui a marqué les esprits. Ce dernier a deux costumes emblématiques qui ont fait les beaux jours des boutiques de merchandising : la combinaison de labo jaune avec le masque à gaz sur la tête, et la tenue de “final boss” du jeu. Blouson noir, chemise et pantalon sombres, des lunettes rudimentaires et un bouc bien tondu, et enfin le “pork pie hat” sur la tête qui vient parfaire le look de l’ancien prof de chimie devenu dealer de meth.

C’est dans ce chapeau et ses quelques centimètres carrés de feutrine que réside toute l’essence de Heisenberg. Un hommage à peine voilé à l’inspecteur Popeye Doyle, joué par Gene Hackman, qui traquait un cartel de narcotrafiquants jusqu’en France dans le film de 1971 French Connection. Ce chapeau est d’ailleurs tellement iconique qu’il est entré au musée national d’histoire américaine, le fameux Smithsonian, où il côtoie d’ailleurs… le costume de Don Draper.

Game of Thrones, Daenerys

© HBO

On avait l’embarras du choix, tant sur les personnages que sur leurs costumes. On a d’ailleurs déjà écrit sur le sujet, deux fois ! Mais s’il fallait n’en retenir qu’une, ce serait la robe bleue portée par Daenerys. C’est probablement l’une des moins sophistiquées de ses tenues, mais elle est tout un symbole, à la fois de la transformation de Daenerys, et de l’ombre colonialiste qui planait sur son règne. Comme l’expliquait Michele Clapton, la costume designer de la série, elle porte souvent un pantalon sous ses robes pour être prête à fuir à n’importe quel moment. Avec ce look, elle brise son image de princesse pour adopter quelque chose de plus pratique. Cette toge bleue croisée sur la poitrine contraste superbement avec l’ocre de la cité de Yunkai, aussi appelée “la Cité jaune”.

Visuellement, donc, l’image est belle. Mais il est difficile d’ignorer la connotation raciale derrière ce cliché. Car le bleu de la robe et le teint diaphane de Daenerys ne tranchent pas qu’avec le décor… ils s’opposent aussi à la couleur de peau des esclaves libérés par la mère des dragons. Portée aux nues et surnommée Mhysa, “mère”, par ceux dont elle vient de briser les chaînes, Daenerys s’inscrit dans une longue tradition du “sauveur blanc face au sauvage reconnaissant”. Si Game of Thrones a fait bien des efforts pour rendre justice à ses héroïnes (pas toujours avec succès), elle n’a jamais su comment traiter la question raciale, et cette tenue est aussi là pour nous le rappeler.

Westworld, The Man in Black

© HBO

Prenez un grand méchant sans nom, habillez-le de noir, et le tour est joué ! Ce n’est évidemment pas si simple – rien ne l’est dans Westworld – et l’anonymat de ce personnage, joué par l’acteur à la mine patibulaire Ed Harris, et le code couleur de son costume ne sont évidemment pas choisis au hasard. Celui que l’on a baptisé l’homme en noir, qui hante Dolores et a fait du parc son terrain de jeu pervers et sanglant, n’a que très peu de variations dans ses vêtements. Quand il est dans Westworld, il s’habille bien sûr avec un costume sombre d’époque, veston et foulard compris. Et longtemps durant la saison 1, cette palette qui va du marron foncé au gris anthracite, voire quelques touches de blanc grâce à la chemise, avec bien sûr une dominante de noir, va surtout nous induire en erreur quant à son identité.

On le prendra d’abord pour une version âgée de Logan, le riche merdeux joué par Ben Barnes. Rien n’est fait pour nous dissuader du contraire puisque, très symboliquement, quand il invite son beau-frère pour la première fois dans le parc, il choisit le chapeau noir, quand ce brave William lui préfère le blanc. Les pions étaient avancés, mais on ignorait alors que cette partie d’échecs était truquée dès le début. L’homme en noir était en fait William, et son costume représente l’aboutissement de sa transformation et son basculement vers le mal absolu.

Stranger Things, Eleven

© Netflix

Cette petite robe rose pâle, ce blouson bleu et cette perruque blonde, c’est le reflet de ce qu’Eleven croit devoir devenir pour se fondre dans le décor : une fillette comme les autres. On est en plein dans la performance de genre car, dans l’inconscient collectif, une fille c’est effectivement une robe, la couleur rose, et les cheveux longs. Et si le déguisement est flagrant, c’est justement parce qu’Eleven n’a pas besoin de tout ça pour affirmer qui elle est, mais ça, elle ne l’apprendra que plus tard.

La fragilité qu’inspire ce look (encore une caractéristique que l’on associe à la féminité) est directement en opposition avec sa puissance. D’ailleurs, c’est quand elle tombe la perruque et dévoile son crâne rasé qu’on atteint le point culminant de cette saison 1, lorsqu’elle fait la démonstration de ses pouvoirs pour défendre ses camarades. Ce n’est évidemment pas un hasard si ce sont les garçons qui lui choisissent cette tenue. Elle s’en affranchira, heureusement, et la dernière saison en date lui donnera tout le loisir de trouver son style perso.

Peaky Blinders, Tommy Shelby

© BBC

On peut difficilement faire plus iconique quand la tenue des héros donne son nom à la série. Les Peaky Blinders, nom de gangsters ayant vraiment existé à Manchester et personnifiés dans la fiction par le clan Shelby, sont appelés ainsi à cause des lames de rasoir qu’ils planquent dans la visière de leur casquette. Quand ça commençait à chauffer, ils faisaient virevolter leur couvre-chef, dont le surnom était “peaky”, pour lacérer leurs adversaires qui finissaient parfois aveugles (d’où le terme “blinders” : qui rendent aveugle). Le reste du look est constitué de costumes trois-pièces en tweed, et d’une longue redingote en laine.

C’est suffisamment chic pour inspirer l’autorité, mais sans trop creuser un fossé entre eux et le milieu prolétaire et pauvre qui les a vu naître. Pas besoin d’avoir l’odorama pour imaginer, imprégné dans le tissu, les effluves de tabac et d’alcool. Ça suinte la virilité, la castagne et les soirées qui s’éternisent au pub. Si vos potes ne jurent plus que par les Peaky Blinders et s’inspirent de leur look, jusqu’à la coupe de cheveux bien dégagée derrière les oreilles, c’est parce que les Shelby leur renvoient une certaine image perdue (fort heureusement) de la masculinité.

The Walking Dead, Daryl

© AMC

Stéréotype du biker taciturne aux cheveux gras et élevé à l’idéologie néonazie, Daryl Dixon fera vite péter le carcan auquel son look le destinait, sans jamais lâcher son iconique veste en cuir sans manches (et sans jamais se laver les cheveux). En dix saisons de The Walking Dead, le bad guy chouchou des fans a gagné en sexytude ce qu’il a perdu en hygiène corporelle. Il est quasi impossible de trouver une photo de lui sans sa tenue réglementaire, avec ou sans arbalète. Mais loin des clichés virilistes, le personnage s’avérera bien plus complexe et sensible que ne le laissaient présager ses débuts sur nos écrans.

En saison 9, son look a même connu une petite révolution, pourtant passée inaperçue. L’une des deux ailes brodées au dos de sa veste a disparu. Deux hypothèses s’imposent alors : soit c’est de l’usure normale étant donné les conditions de vie spartiates, les dangers et l’ellipse de six ans qu’a fait la série, soit c’est Daryl lui-même qui l’a enlevée, encore endeuillé par la disparition de Rick. On a envie d’y voir un symbole…

Orange is the new black, les filles de Litchfield

© Netflix

“The animals, the animals, trapped, trapped, trapped ’till the cage is full.” Les animaux de la chanson de Regina Spektor, se sont les prisonnières de Litchfield qui nous offraient, pour la première fois en 2013, une plongée dans l’univers carcéral au féminin. Si la palette change en fonction des établissements pénitentiaires et du quartier où sont placées les détenues, on découvre rapidement que le titre de la série peut être trompeur : la tenue orange laisse vite place à une couleur difficile à déterminer. C’est… beige. L’uniforme en général, c’est la négation de son individualité et c’est exactement ce que fait le système carcéral dénoncé dans la série.

Ces femmes deviennent des numéros, les objets de paris entre les gardiens, des épines sous le pied de l’administration dès qu’elles réclament un traitement plus humain et, en plus, on les confond avec le mur de la prison à cause de cette couleur dégueulasse. Certaines, comme Flaca et Maritza, reprennent un semblant de contrôle sur leur féminité en customisant leur look, en bonnes youtubeuses beauté qu’elles sont. Les rares touches de personnalité acceptées sont capillaires. Ainsi, on associe Crazy Eyes aux tortillons qu’elle se fait dans les cheveux avec les doigts, Piper à la blondeur de son white privilege, Red tire même son surnom de sa teinture bon marché, etc. On a même parfois du mal à les reconnaître quand on les voit dans des flash-back, hors de la prison et dans des habits de civiles.

Mr. Robot, Elliot Alderson

© USA Network

Antisocial, il perd son sang-froid. Hanté par un père imaginaire, Elliot Alderson est l’incarnation d’une génération perdue, un hacker de génie névrosé qui va mettre le pied dans la fourmilière capitaliste, et va décider d’y ajouter quelques bâtons de TNT pour faire péter le système. Sa panoplie, c’est un peu le cliché du pirate informatique, arc-bouté dans un sweat à capuche, avec un sac à dos dans lequel il range son ordinateur. Mais pour Elliot, c’est plutôt une cape d’invisibilité.

En bon phobique social doublé d’un ingénieur en cybersécurité pouvant craquer n’importe quel mot de passe, pour lui, l’anonymat est un peu une question de survie. Elliot semble autant se préoccuper de la mode que de la dernière mise à jour OS. Un millennial qui n’a pas de profil Facebook ou Insta à l’aube de 2020, c’est aussi rare que les couleurs dans sa garde-robe. Paranoïaque, dépressif, il souffre de troubles anxieux, de dépression chronique et d’hallucinations. Notre héros s’habille évidemment tout en noir, comme ses idées. Sa tenue rappelle celle des membres de mouvements anarchistes comme les black blocs. Lui aussi est en guerre, contre la société et contre lui-même.