Comment bichonner son sommeil, selon le docu Dormir à tout prix

Ronflex, montre-nous la voie

Comment bichonner son sommeil, selon le docu Dormir à tout prix

photo de profil

Par Antonin Gratien

Publié le

Notre lifestyle de digi-zombies a transformé l'insomnie en fléau des temps modernes, qui touche 10 % des adultes.

Du mal à fermer l’œil ? Vous n’êtes pas les seuls. Une épidémie de carence de sommeil frappe le globe, et le nombre de ses victimes s’élève déjà à quelque 600 millions d’insomniaques. Un carnage dont Dormir à tout prix dresse l’inquiétant bilan. Réalisé par Thierry Robert, cette enquête documentaire nous entraîne des universités américaines aux hôpitaux parisiens, afin d’éclairer les (multiples) raisons pour lesquelles notre sommeil est de plus en plus perturbé. Sans oublier d’évoquer, à l’appui des dernières découvertes scientifiques, de nouvelles pistes de prises en charge. Loin, très loin, de “l’escroquerie intellectuelle” qu’est le somnifère. Tour d’horizon

Lumière bleue : l’ennemi n°1 du sommeil 

Le chiffre est édifiant. En à peine 50 ans, nous avons perdu près d’une heure et demie de sommeil par nuit. Résultat : en France, un individu reste en moyenne 6h48 dans les bras de Morphée, et les 18-35, moins de 6h. C’est peu. Beaucoup trop peu. Mais comment expliquer cette régression galopante de nos heures de repos ?

En premier lieu (et sans grande surprise), les experts invoquent notre nouvel environnement lumineux. Alors que notre organisme est biologiquement régulé pour harmoniser ses cycles de sommeil avec la lumière naturelle, nous baignons désormais sous la lumière bleue jusqu’à des heures tardives. Lampes LED, tablette, portable… Qui, aujourd’hui, éteint ces objets passé 20h, comme le recommandent les autorités médicales ? Pas grand monde, avouez.

“Comme nous avons réduit l’effet synchroniseur de la lumière naturelle et que nous avons augmenté l’effet perturbateur de la lumière électrique, ça nous a complètement dispersés, (…) notre rythme circadien a été déréglé vers des horaires plus tardives”, développe le professeur Charles A. Czeisler.

Autres éléments nuisibles : la sédentarisation (ainsi que la généralisation du télétravail) qui limite nos déplacements – et donc nos efforts physiques. Ce, alors que l’activité sportive est reconnue comme un important facteur, pour assurer la qualité du repos. Personne ne tombera de son siège en apprenant, aussi, que le stress et l’anxiété – qui sont plutôt monnaie courante à l’ère de l’hyper-productivité – parasitent le sommeil.

Exit le somnifère, bienvenue aux solutions next gen

La dette du sommeil entraîne une foule de conséquences ravageuses. Certaines sont biens connues (baisse de vigilance, irritabilité…), d’autres sont encore à explorer. Selon certaines études, la carence de sommeil pourrait jouer un rôle dans l’apparition d’Alzheimer. Quant aux personnes atteintes d’apnée du sommeil, soit environ la moitié des plus de 40 ans, ils auraient plus de risque que la moyenne de développer des maladies neuro-dégénératives, ou vasculaires.

Pour faciliter l’endormissement, le premier réflexe est souvent de demander une prescription de somnifères. Une habitude malheureuse, estime le psychiatre et docteur en neurosciences Patrick Lemoine : “ce produit est censé induire le sommeil, mais c’est une escroquerie intellectuelle ! En vérité, ses propriétés anesthésient, elles transforment un peu les gens en légume”. Et les rendent accro.

En France, deuxième prescripteur européen de somnifères où les boîtes s’écoulent à 131 millions par année, on connaît désormais l’effet addictif, et les retombées toxiques sur le long terme, des médicaments de la famille des benzodiazépines. Ce qui n’empêche pas ce faux-ami d’être remboursé par la sécurité sociale, d’ailleurs. Bon. Mais alors quoi, serions-nous dans une impasse à la Charybde et Scilla ? Empiler les nuits blanches, ou finir drogué ?

Heureusement non, rassurent les spécialistes du documentaire, en évoquant plusieurs alternatives. La psychothérapie, par exemple. Une bonne piste pour dénicher la cause du “symptôme” que pourrait, in fine, se révéler être le trouble du sommeil. “La dépression est le premier pourvoyeur d’insomnie, et on ne soigne pas l’insomnie à coup de somnifère”, flingue Patrick Lemoine.

D’autres experts redirigent vers des médecines “naturelles”, comme la pleine méditation, le sport en fin d’après-midi ou la sophrologie, tandis que d’autres misent sur la hightech. Comme avec ce casque à pulsion électrique, dont les décharges permettent d’endiguer la production du cortisol (l’hormone du stress) tout en boostant celles de la dopamine (celle du bonheur). On n’arrête pas le progrès.